« Le Grand Condé, un exil pour l’honneur »
Xavier Le Person Éditions Fayard
Louis II de Bourbon, prince du sang passé à la postérité sous le nom de Grand Condé, prit les armes contre l’autorité royale pendant la Fronde et se mit au service de Philippe IV d’Espagne. Il fut déclaré criminel de lèse-majesté, déchu de ses titres et privé de ses biens. Après plusieurs années d’exil, il négocia son rétablissement et le jeune Louis XIV lui pardonna en 1660.
À l’occasion de cet entretien, Xavier Le Person répond aux questions du Scribe dans cet entretien tourné près du Grand Canal du château de Versailles.
« Le Grand Condé fut un homme de guerre dont la réputation et le prestige dépassèrent les frontières. Le cardinal de Retz se plaisait à le rappeler : « Monsieur le Prince est né capitaine, ce qui n’est jamais arrivé qu’à lui, à César et à Spinola’. Il a égalé le premier; il a passé le second. L’intrépidité est l’un des moindres traits de son caractère. La nature lui avait fait l’esprit aussi grand que le cœur. La fortune, en le donnant à un siècle de guerre, a laissé au second toute son étendue?. » – Le cardinal de Retz à propos du Grand Condé
« Sans entrer dans des considérations héroïques, morales ou téléologiques, cet ouvrage traite essentiellement des fondements de la rupture politique du Grand Condé avec l’autorité royale, des modalités militaires de sa « retraite », des conditions de son retour en grâce et de son rétablissement. Ces questions n’avaient pas encore fait l’objet de travaux historiques approfondis. Au-delà des aspects relatifs à la vie du prince de Condé, de son parcours politique et militaire, ce livre s’intéresse aux comportements politiques de la noblesse au temps de la Fronde et sous le ministériat de Mazarin. Il s’attache à cerner et à comprendre les préoccupations des gentilshommes, leurs interactions, la manière dont ils se percevaient mutuellement.- Xavier Le Person
L’édition 2024 du Prix Château de Versailles du livre d’histoire
Le Prix Château de Versailles du livre d’histoire récompense l’auteur d’un ouvrage historique dont le sujet principal s’inscrit dans le cadre chronologique des XVIle et/ou XVIlle siècle(s), ou plus largement si celui-ci concerne l’histoire du château, du musée et du domaine national de Versailles.
L’auteur de ce Blog est membre du jury final de ce prestigieux Prix.
Exposition « La Fontaine des Innocents. Histoires d’un chef-d’œuvre parisien »
24 avril – 25 août 2024 Musée Carnavalet – Histoire de Paris (Paris)
La fontaine des Innocents est un monument emblématique du quartier des Halles à Paris. Depuis la Renaissance, il n’a eu de cesse de se métamorphoser au rythme des mutations urbaines. Sa restauration, débutée en juillet 2023 et qui prendra fin en juin 2024, offre l’occasion exceptionnelle de découvrir dans des conditions privilégiées les reliefs sculptés par Jean Goujon, déposés du monument. Dans l’exposition du musée Carnavalet, les cinq nymphes dialoguent ainsi avec les trois reliefs conservés au musée du Louvre depuis le début du XIXe siècle.
Juliette Tanré-Szewczyk, conservatrice en chef, chargée du département des sculptures et du patrimoine architectural et urbain au musée Carnavalet-Histoire de Paris, et Sophie Picot-Bocquillon, chargée d’études documentaires, responsable du pôle documentaire de la COARC, vous invitent à découvrir l’histoire mouvementée de ce monument.
« C’est le sculpteur le plus habile qui ait paru en France : il avait obtenu le titre glorieux de Phidias français. Tout ce qui est sorti de son ciseau est admirable. Rien n’est plus beau que sa fontaine des SS. Innocens [sic] […]. Cet ouvrage est un de ceux qui honorent le plus l’école française ; il règne entre la sculpture et l’architecture dont le monument se compose, une harmonie qui charme la vue, et qui provoque d’aimables sensations. […] Les Grecs n’ont rien produit de plus parfait. » – Alexandre Lenoir, dans la publication du musée des Monuments français
Moulage d’une figure encadrant un oculus de l’aile Lescot du palais du Louvre, avant 1883 : la Victoire ou la Gloire d’après Jean Goujon (actif de 1541 à 1563) – Cité de l’architecture et du patrimoine (Paris)
Jean Goujon est l’un des sculpteurs majeurs de la Renaissance française, mais aussi l’un des plus méconnus. De nombreux éléments de sa biographie restent obscurs, comme les circonstances de sa naissance et de sa mort, ou les étapes de sa formation : a-t-il effectué un voyage en Italie ? Cela expliquerait sa connaissance des modèles antiques et sa culture classique.
Jubé de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois (1544) par Jean Goujon – Musée du LouvreDétail de « Déploration du Christ », relief du jubé de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois (1544) par Jean Goujon – Musée du Louvre
La première commande parisienne que l’on peut attribuer avec certitude à Jean Goujon est celle du décor d’un jubé – une tribune séparant le chœur de la nef –, pour l’église Saint-Germain-l’Auxerrois. Le marché d’exécution des reliefs, daté de 1544, a en effet été conservé. Pierre Lescot en conçoit l’architecture et Goujon sculpte, côté nef, cinq reliefs offerts au regard des fidèles : au centre, une scène de Déploration, encadrée de part et d’autre de deux reliefs représentant les quatre évangélistes : Jean, Luc, Marc et Matthieu.
« La fontaine des Innocents et son quartier en pleine transformation » (avant 1787) par Jean-Nicolas Sobre (? -1806) – Bibliothèque nationale de France
En 1548, la construction d’une fontaine débute à l’angle des rues Saint-Denis et aux Fers. Elle jouxte l’église des Saints-Innocents et le cimetière du même nom. Œuvre de Jean Goujon, peut-être associé à l’architecte Pierre Lescot, la nouvelle fontaine s’inscrit dans un programme d’aménagement urbain de la ville de Paris. Récemment achevée lors de l’entrée d’Henri II dans Paris, en 1549, elle se dresse sur le parcours du cortège royal allant de la porte Saint-Denis au palais de la Cité. Mais sa fonction première reste l’alimentation en eau du quartier des Halles. Son décor célèbre les divinités mythologiques et les créatures marines qui peuplent les sources abreuvant la capitale.
« Le Marché et la fontaine des Innocents » (1822) par John James Chalon – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
La fontaine est un édifice maçonné, élevé sur un haut soubassement qui abrite le réservoir. Elle s’organise alors autour de trois arcades et forme une loggia. Des reliefs horizontaux se répartissent sur le piédestal et au-dessus des arcades où ils sont couronnés de frontons triangulaires. Cinq figures verticales de nymphes occupent les espaces situés entre les ouvertures. L’eau s’écoule en minces filets depuis des robinets insérés dans des mufles de lions ornant le soubassement.
« Nymphe et petit génie monté sur un dragon marin », relief du soubassement de la fontaine des Innocents (1548-1549) par Jean Goujon – Musée du Louvre
Avec ces figures élancées de nymphes, dans des positions variées et éloignées de toute réalité anatomique, Goujon livre un manifeste de la sculpture maniériste. L’écoulement de l’eau est évoqué par les plis des fins drapés mouillés qui adhèrent aux corps, rappelant la sculpture antique.
« La Source » (1856) par Jean-Auguste-Dominique Ingres – Musée du Louvre, œuvre en dépôt au musée d’Orsay
Si plusieurs générations de sculpteurs vont se nourrir de l’art de Jean Goujon, de David d’Angers à Maillol en passant par Carpeaux, une filiation se dessine également avec le peintre Jean Auguste Dominique Ingres, qui reprend la composition de l’une des nymphes de la fontaine pour « La Source », un de ses chefs-d’œuvre achevé en 1856. Cette œuvre devient à son tour source d’inspiration de nombreux artistes.
« Néréide rapportant le casque d’Achille » (1815) par David d’Angers – Musées d’Angers / Galerie David d’Angers
« Le grand secret pour bien sentir le bas-relief c’est de dessiner comme un peintre. Je ne doute nullement que Jean Goujon n’ait dessiné comme un peintre. » – Pierre-Jean David dans « Les carnets de David d’Angers »
Copie d’une nymphe de la face ouest de la fontaine des Innocents, d’après Augustin Pajou (1730-1809) – Conservation des œuvres d’art religieuses et civiles (Paris)
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
À droite : « L’Eau », sculpture conçue pour orner une niche du vestibule de l’hôtel de Voyer d’Argenson (années 1760) par Augustin Pajou
Commissariat de l’exposition
Commissariat général Valérie Guillaume, conservatrice générale du patrimoine, directrice du musée Carnavalet-Histoire de Paris. Véronique Milande, conservatrice en chef du patrimoine, responsable de la Conservation des Œuvres d’Art Religieuses et Civiles de la Ville de Paris (COARC). Commissariat scientifique Emmanuelle Philippe, conservatrice en chef, en charge du patrimoine civil à la COARC. Sophie Picot-Bocquillon, chargée d’études documentaires, responsable du pôle documentaire de la COARC. Juliette Tanré-Szewczyk, conservatrice en chef, chargée du département des sculptures et du patrimoine architectural et urbain au musée Carnavalet-Histoire de Paris.
Figures du fronton principal de l’attique de la cour du Louvre (1803-1805) par Louis-Pierre Baltard (1764-1846), dessinateur et graveur – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
Buste de Jean Goujon (1797) par Claude Michallon (1751-1799), achevé par Guillaume Francin (1741-1830) – Musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon (Versailles)
Exposition « La Fontaine des Innocents. Histoires d’un chef-d’œuvre parisien »
24 avril – 25 août 2024 Musée Carnavalet – Histoire de Paris
23 rue de Sévigné
75003 Paris
« Façade est de la fontaine des Innocents », détail d’une nymphe (entre 1855 et 1865) par Charles Marville – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
« Voyager en Europe au temps des Lumières. Les émotions de la liberté »
Gilles Montègre Éditions Tallandier
Confrontant les manuscrits inédits de François de Paule Latapie avec 254 autres écrits de voyageurs des Lumières, Gilles Montègre propose une autre approche historique du voyage, écrite « au ras du sol et au fil du chemin ». À l’heure où le défi environnemental remet en question le modèle du tourisme de masse, ce livre nous invite à redonner du sens à nos manières de voyager.
À l’occasion de cet entretien, Gilles Montègre répond aux questions du Scribe dans un lieu emblématique de la philosophie des Lumières : le parc Jean-Jacques Rousseau d’Ermenonville (département de l’Oise).
Île des peupliers – Parc Jean-Jacques Rousseau d’Ermenonville
Le parc Jean-Jacques Rousseau fut nommé ainsi en hommage au philosophe qui y passa les dernières semaines de sa vie et y fut inhumé sur l’Ile des Peupliers entre 1778 et 1794, avant le transfert de ses cendres au Panthéon.
C’est à partir de 1763, et durant plus de dix ans, que le marquis de Girardin modela les paysages autour du Château d’Ermenonville. En rupture avec le jardin régulier, ce jardin pittoresque offre une succession de « tableaux » inspirés de la peinture du Lorrain ou de Nicolas Poussin.
Temple de la philosophie moderne – Parc Jean-Jacques Rousseau d’Ermenonville
« Les quatre sentiers que le livre va s’attacher à parcourir ont ancré en moi une conviction forte. Le voyage n’est pas un objet d’étude secondaire, appelé à demeurer à la croisée, voire aux marges des recherches historiques et littéraires. Envisagé comme expérience, le voyage forme au contraire un champ décisif pour approcher l’histoire au plus près, dans la mesure où il est un catalyseur des aspirations, des impasses et des émotions qui singularisent toute société. » – Extrait de l’ouvrage de Gilles Montègre
L’édition 2024 du Prix Château de Versailles du livre d’histoire
Le Prix Château de Versailles du livre d’histoire récompense l’auteur d’un ouvrage historique dont le sujet principal s’inscrit dans le cadre chronologique des XVIle et/ou XVIlle siècle(s), ou plus largement si celui-ci concerne l’histoire du château, du musée et du domaine national de Versailles.
L’auteur de ce Blog est membre du jury final de ce prestigieux Prix.
Exposition « Les arts en France sous Charles VII (1422-1461) »
12 mars – 16 juin 2024
Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge (Paris)
Le musée de Cluny met en lumière un moment charnière de l’histoire et de l’histoire de l’art, celui du règne de Charles VII (1422-1461).
À partir des années 1420, pendant la guerre de Cent Ans, le royaume de France connaît de profondes mutations politiques et artistiques. Le nord du royaume est occupé par les Anglais et les Bourguignons. Quand le dauphin Charles parvient à reconquérir son trône, grâce à Jeanne d’Arc notamment, puis son royaume, les conditions d’un renouveau sont réunies.
Une nouvelle génération d’artistes se convertit au réalisme à la flamande, tandis qu’à travers l’influence italienne, ils s’imprègnent de l’héritage antique développé par des artistes comme Filippo Brunelleschi, Donatello ou Giovanni Bellini. La création artistique entre en rupture progressive avec le gothique international et se tourne vers une nouvelle vision de la réalité, prémices de la Renaissance.
L’exposition présente de prestigieux manuscrits enluminés, peintures, sculptures, pièces d’orfèvrerie, vitraux et tapisseries. Des œuvres exceptionnelles y figurent, comme le dais de Charles VII (musée du Louvre), le manuscrit des Grandes Heures de Rohan (Bibliothèque nationale de France) ou le tableau de l’Annonciation d’Aix (Aix-en-Provence) par Barthélémy d’Eyck. Pour la première fois, le triptyque parisien de la Passion et Résurrection du Christ par André d’Ypres est reconstitué dans son intégralité (musée du Louvre, Getty Museum, musée Fabre).
Pour cette visite privée exceptionnelle, vous êtes accompagnés par Mathieu Deldicque, conservateur en chef du patrimoine, directeur du musée Condé de Chantilly, et Maxence Hermant, conservateur en chef à la Bibliothèque nationale de France, département des Manuscrits, service des manuscrits médiévaux.
Détail du Dais dit de Charles VII : deux anges tenant une couronne (vers 1430-1440) ) d’après Jacob de Littemont (?) – Musée du Louvre
Détail du manuscrit enluminé des « Grandes Heures de Rohan » (vers 1440) par le Maître de Rohan – Bibliothèque nationale de France« Heures à l’usage de Paris » par un artiste non identifié, actif entre Paris et la Picardie, et Maître de la Légende dorée de Munich – Paris ou Picardie, 1420-1425, et Paris, 1427-1440 -Bibliothèque nationale de FranceDétail du Reliquaire de la Sainte Épine – Égypte, Xe-XIe siècle et Paris, vers 1420-1450 (?) – Palais du Tau (Reims)Statue présumée de Jean de Dunois en saint Georges – Val-de-Loire, vers 1460-1470 – Chapelle du château de ChâteaudunAu premier plan : Saint Jean – Touraine, vers 1450-1475 – Musée du LouvreVitrail : les joueurs d’échecs (XVe siècle) – Musée de Cluny – musée national du Moyen ÂgeDétail du panneau central de l’Annonciation d’Aix par Barthélémy d’Eyck (1420-1470) – Musée du Vieil-AixTriptyque de Dreux Budé par André d’Ypres (Maître de Dreux Budé) – Paris, vers 1450 – Musée du Louvre, Getty Museum et Musée Fabre (Montpellier)Détail de « La Résurrection avec trois donatrices, Jeanne Peschard et ses filles Jacquette et Catherine, présentées par sainte Catherine » (vers 1450) par le Maître de Dreux-Budé (André d’Ypres ?) Panneau droit du triptyque de Dreux-Budé – Musée Fabre (Montpellier)Détail de la rose sud de la cathédrale d’Angers, d’après un modèle du Maître d’Adélaïde de Savoie (?), André Robin, peintre verrierExposition « Les arts en France sous Charles VII (1422-1461) » – Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge
Couple sous un dais – Pays-Bas du sud (Tournai ?), vers 1455-1460 – Musée des arts décoratifs (Paris)
Exposition « Les arts en France sous Charles VII (1422-1461) »
12 mars – 16 juin 2024
Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge
28 Rue du Sommerard
75005 Paris
Autoportrait en médaillon par Jean Fouquet (vers 1452-1455) – Musée du Louvre
« Le 14 juillet de Mirabeau. La revanche du prisonnier »
Loris Chavanette Éditions Tallandier
« Comment, en dix ans, ce démon d’une famille est-il devenu le dieu d’une nation ? », interroge Victor Hugo sur cet homme-énigme que demeure Mirabeau. L’histoire a surtout retenu de lui sa tirade de juin 1789 : « Allez dire à ceux qui vous envoient… »
Dans cet ouvrage, Loris Chavanette montre le rôle décisif de Mirabeau entre le 8 juillet 1789, quand celui-ci demande à Louis XVI le retrait des troupes royales disposées dans Paris et à Versailles, et le 16 juillet, quand il vient en personne participer à la démolition de la Bastille.
À l’occasion de cet entretien, Loris Chavanette répond aux questions du Scribe dans un lieu prestigieux : la salle du Jeu de Paume de Versailles.
Le 20 juin 1789, la salle du Jeu de Paume est devenue le symbole de la Révolution en marche. Les députés du Tiers État s’y sont réunis à l’occasion de la tenue des États généraux, l’hôtel des Menus-Plaisirs, leur salle de réunion habituelle, étant fermée par ordre du Roi.
Salle du Jeu de Paume de Versailles
« Démêler la part de fantasme et celle de vérité attachées à un tel personnage n’est pas chose aisée. Il faut approcher avec beaucoup de modestie une statue de marbre comme la sienne, si l’on ne veut pas être terrassé au premier coup d’œil par cette tête de Gorgone française. Sainte-Beuve reconnaît d’ailleurs que Mirabeau ne peut être abordé ni de plein ni de biais. Nous allons donc le mettre sous la lumière du mois de juillet, durant l’été le plus ardent de l’histoire de France. En pénétrer le sens permettra d’en apprendre peut-être un peu plus sur nous-mêmes, comme individus et comme peuple. » – Extrait de l’ouvrage de Loris Chavanette
« Mirabeau a déjà subi la métamorphose qui s’opère parmi ceux dont la mémoire doit demeurer; porté du Panthéon à l’égout, et reporté de l’égout au Panthéon, il s’est élevé de toute la hauteur du temps qui lui sert aujourd’hui de piédestal. On ne voit plus le Mirabeau réel, mais le Mirabeau idéalisé, le Mirabeau tel que le font les peintres, pour le rendre le symbole ou le mythe de l’époque qu’il représente : il devient ainsi plus faux et plus vrai. » – Chateaubriand, « Mémoires d’outre-tombe »
L’édition 2024 du Prix Château de Versailles du livre d’histoire
Le Prix Château de Versailles du livre d’histoire récompense l’auteur d’un ouvrage historique dont le sujet principal s’inscrit dans le cadre chronologique des XVIle et/ou XVIlle siècle(s), ou plus largement si celui-ci concerne l’histoire du château, du musée et du domaine national de Versailles.
L’auteur de ce Blog est membre du jury final de ce prestigieux Prix.
Après l’exposition de 2023 consacrée à Paul Richer et la sculpture du travail, cette seconde exposition révèle deux autres facettes de Paul Richer : son rôle de médecin et son œuvre en tant qu’artiste.
Elle explore la relation étroite entre l’art et la science dans les œuvres de Richer et montre ses sculptures mettant en avant l’anatomie masculine à travers des athlètes en mouvement, des malades et des œuvres pédagogiques, illustrant sa précision anatomique. Elle présente aussi les ouvrages médicaux illustrés et sa thèse réalisée sous la direction de Jean-Martin Charcot.
Pour cette visite privée, vous êtes accompagnés par Grégoire Hallé, directeur du musée des Beaux-Arts de Chartres et commissaire de l’exposition.
« Charcot de profil enseignant », dans « Cahiers d’observations pendant les leçons de Charcot à la Salpêtrière » (1882) – Beaux-Arts de Paris« Homme debout, le côté gauche écorché » (1906) par Paul Richer – Beaux-Arts de Paris« Virtuti palma » (avant 1900) par Paul Richer – Collection particulière
La sculpture permet à Richer d’étudier l’anatomie de ses modèles, mais aussi de représenter des pathologies à des fins pédagogiques. Des représentations de malades, comme « La Parkinsonienne » (1895), sont exposées.
Au premier plan : « Femme atteinte de paralysie glosso-laryngée » par Paul Richer – Musée de l’AP-HP (Paris)« Portrait de Descartes avec montage incorporé d’un moulage de son crâne » (1913) par Paul Richer – Beaux-Arts de Paris
L’exposition présente également des hommages sculptés à des personnalités, scientifiques et grands médecins, ainsi que des sculptures féminines, écho à ses travaux sur l’anatomie féminine des années 1910.
Au premier plan : « Portrait de Louis Pasteur » (Salon de 1902) par Paul Richer – Musée des Beaux-Arts de Chartres
Deux grands groupes sculptés seront présentés : « Tres in una » (1913) et « L’Art et la Science devant Minerve » (vers 1930) reflètent les travaux de l’artiste sur la morphologie féminine.
« L’Art et la Science devant Minerve » par Paul Richer – Musée des Beaux-Arts de Chartres
Exposition « En chair et en os. Paul Richer, l’art et la médecine »
16 mars – 16 juin 2024
Musée des Beaux-Arts de Chartres
29 cloître Notre-Dame
28000 Chartres
« Formes extérieures du tronc » (1889) par Paul Richer – Beaux-Arts de Paris
Peindre en Bourgogne aux XVe et XVIe siècles
Épisode 2 : Les Ménassier
S’il est peu familier, le nom des Ménassier n’est pas totalement inconnu pour autant. Anthony Blunt lui-même cite notamment André Ménassier en 1953. Visiblement assez demandés de leur temps par la bourgeoisie locale, André, Claude et Ithier Ménassier ont développé chacun à leur tour une manière particulière, fondée sur de grandes compositions italiennes et flamandes diffusées par la gravure.
Nicolas Bousser, historien de l’art et directeur du web-magazine Coupe-File Art, nous entraîne en Bourgogne, entre Semur et Montbard, à la découverte de la famille Ménassier.
Le web-magazine Coupe-File Art et le Scribe s’associent pour le deuxième épisode de cette web-série tournée en Bourgogne.
« Le Christ et la femme adultère » (1602) par André Ménassier – Église Saint-Martin de Saint-Martin-en-Bresse
Le nom de Ménassier est assez répandu en Auxois à la fin du XVIe siècle, et les sources ne concernent pas nécessairement nos peintres. Dans les registres de Semur, le nom de Nicolas Ménassier, drapier, revient par exemple à de très nombreuses reprises tandis que l’on trouve en 1543 à Montbard un maître Jehan Ménassier, chirurgien. C’est en 1589 qu’apparaît pour la première fois le peintre André Ménassier, dans les documents, à Semur-en-Auxois.
« Annonciation » – Triptyque de la Crucifixion d’Annay-sur-Serein (1608) par Ménassier (Claude ? Atelier ?) – Église Saint-Pierre d’Annay-sur-SereinTriptyque de la Crucifixion d’Annay-sur-Serein (1608) par Ménassier (Claude ? Atelier ?) – Église Saint-Pierre d’Annay-sur-SereinSaint Pierre et saint Paul – Revers du triptyque de la Crucifixion d’Annay-sur-Serein (1608) par Ménassier (Claude ? Atelier ?) – Église Saint-Pierre d’Annay-sur-SereinÉglise Saint-Pierre d’Annay-sur-Serein
D’André Ménassier, nous relevons cinq œuvres conservées en Bourgogne et attribuables au peintre de manière certaine, quatre tableaux et un cycle de peintures murales conçu pour la chapelle du château d’Ancy-le-Franc.
« La Vie des Pères du désert » (1596) par André Ménassier et atelier – Chapelle du château d’Ancy-le-Franc
Le chantier des décors de la chapelle du château d’Ancy-le-Franc, mené par André à partir de 1596, aura sans doute contribué au développement d’un maniérisme, imprégné par des artistes de la Seconde École de Fontainebleau.
Partie inférieure de la chapelle du château d’Ancy-le-Franc (1596) par André Ménassier et atelier
Un pot à tabac en forme de poisson ayant appartenu à Eugène Delacroix (1798-1863), une couronne de laurier dorée offerte à Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867) par les Montalbanais… autant d’objets présentés au musée national Eugène-Delacroix dans une exposition consacrée à ces deux figures artistiques majeures du XIXe siècle.
Exposition « Ingres et Delacroix. Objets d’artistes » – Musée national Eugène-Delacroix » République des Arts », caricature de Charles-Albert Bertall (1820- 1882) parue dans « Le Journal pour rire » du 28 juillet 1849 – Bibliothèque nationale de France
Les deux musées qui portent le nom de deux grands peintres du 19e siècle, le musée national Eugène-Delacroix et le musée Ingres Bourdelle, se réunissent afin de présenter ces deux grands artistes par le prisme de leurs objets.
Exposition « Ingres et Delacroix. Objets d’artistes » – Musée national Eugène-Delacroix
Les objets de Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) et Eugène Delacroix (1798-1863) témoignent de la façon de travailler des deux artistes, mais ils dévoilent aussi une part de leur intimité dans un contexte où il n’y a pas ou peu de représentation de leur lieu de vie ou de création.
« Autoportrait de Raphaël » (d’après le tableau de Raphaël du musée des Offices, à Florence) par Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) – Musée Ingres Bourdelle
Sans être de véritables collectionneurs, Ingres et Delacroix ont possédé des œuvres d’art, dont des copies ou gravures d’après des tableaux d’artistes qu’ils admirent. Parmi les passions d’Ingres, il y a Raphaël. Il voue même un véritable culte à cet artiste et son fétichisme va jusqu’à demander au pape quelques débris d’ossements du peintre italien, lors du transfert de sa dépouille au Panthéon en 1833. Il les obtient et les fait enchâsser dans une boîte reliquaire !
Exposition « Ingres et Delacroix. Objets d’artistes » – Musée national Eugène-Delacroix
La passion d’Ingres pour la musique est incarnée dans l’exposition par la présence de son violon qu’il pratique quotidiennement. Ingres garde précieusement les fragments de partitions originales qui lui ont été offertes : Le canon de Cherubini et les trois partitions de Joseph Haydn (1732-1809), Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), Christopher Willibald Gluck (1714-1787) et Ludwig van Beethoven (1770-1827).
Trois fragments de partitions manuscrites de Haydn, Mozart et Beethoven (entre 1760 et 1827) – Musée Ingres Bourdelle
Delacroix a reçu lui aussi une éducation musicale. Il a pratiqué le violon, le piano et même la guitare dans sa jeunesse. Contrairement à Ingres, il ne pratique plus la musique pendant sa carrière de peintre mais reste un mélomane averti. Tout comme Ingres, il admire Mozart et apprécie Haydn, Gluck ainsi que certains morceaux de Beethoven. Le seul musicien contemporain que Delacroix admire est son grand ami Frédéric Chopin (1810-1849), compagnon de son amie George Sand (1804-1876).
Vièle rabâb appartenant à Delacroix – Musée du Louvre
Eugène Delacroix a aussi en sa possession des instruments de musique orientaux dont certains ont été ramenés de son voyage au Maroc en 1832. C’est lors d’une noce juive que Delacroix découvre le son de ces instruments qui lui serviront de source d’inspiration pour sa « Noce juive » dans le Maroc (musée du Louvre), tableau peint en 1832, soit 7 ans après son voyage.
« Oriental, assis sur un divan, tenant un narghil » par Eugène Delacroix (1798-1863) – Musée du Louvre« L’atelier d’Ingres à Rome » par . Jean Alaux – Musée Ingres Bourdelle
La représentation de l’atelier d’Ingres par son ami, le peintre Jean Alaux (1786-1864) à Rome est une des rares représentations du lieu de travail du peintre. Il nous permet aussi d’avoir un regard sur sa vie intime où il pose non pas en train de peindre mais en train de jouer du violon. Sa femme et son chat sont présents. Seul, les nombreux tableaux aux murs évoquent son activité de peintre.
« L’atelier Delacroix rue Notre-Dame de Lorette » dans « L’illustration » (1852) par Renard, Edouard-Antoine (1802-1857) – Musée du Louvre
La seule représentation connue de Delacroix dans un atelier est celle du journal « L’illustration » où il est représenté dans son atelier rue Notre-Dame de Lorette qu’il occupe de 1845 à 1857. On le voit palette à la main et entouré d’œuvres, d’esquisses et de moulages.
Couronne de laurier dorée (1863) – Musée Ingres Bourdelle (Montauban)
En 1851, Ingres, natif de Montauban, songe à léguer une partie de ses œuvres, ses collections et de son fond d’atelier à sa ville natale. Le 18 juillet, il donne à la ville de Montauban 54 tableaux anciens ainsi que des gravures, des vases antiques et divers objets d’art. À partir de 1854, l’Etat fera des dépôts réguliers de tableaux.
Exposition « Ingres et Delacroix. Objets d’artistes » – Musée national Eugène-Delacroix
Chez Delacroix, les objets sont liés au besoin de se souvenir et peuvent aussi être des sources d’inspiration pour ses œuvres.
« Bacchante endormie dans un paysage ou Nymphe endormie » (1847) par Eugène Delacroix – MNR 953 en dépôt au musée Ingres Bourdelle (Montauban)
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
« Jupiter et Antiope » (1851) par Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) – Musée d’Orsay, dépôt du musée du Louvre
Commissariat de l’exposition
Claire Bessède, directrice du musée Delacroix Florence Viguier-Dutheil, directrice du musée Ingres Bourdelle
« Etude de babouches » (1823-1824 ou 1833-1834) par Eugène Delacroix – Musée du Louvre
Après le musée national Eugène-Delacroix, l’exposition sera présentée au musée Ingres Bourdelle de Montauban du 11 juillet au 10 novembre 2024.
Exposition « Claude Lorrain. Dessins et eaux-fortes »
2 mars – 19 mai 2024
Cabinet d’arts graphiques Château de Chantilly
Célèbre pour les paysages nimbés d’une lumière dorée qu’il peint principalement à Rome, Claude Gellée (vers 1600-1682) – dit le Lorrain, ou simplement Claude – est tout au long de sa carrière un dessinateur aussi acharné que prolifique. Si la campagne romaine, ses vallées et ses arbres ou les scènes bucoliques sont ses premiers motifs d’élection, il se tourne ensuite vers d’ambitieux sujets mythologiques, religieux ou historiques. Malgré l’aspect fini et léché de certaines de ses feuilles, Claude ne dessine en premier lieu que pour lui-même : presque aucun de ses dessins ne quitte son atelier de son vivant.
Pour cette visite privée de l’exposition, vous êtes accompagnés par Baptiste Roelly, conservateur du patrimoine au musée Condé du château de Chantilly.
« Corps de ferme dans les Horti Sallustiani » (vers 1635-1640) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Collection particulière« Paysage de la campagne de Rome », dit « Vue de Prato Longo » (1643) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Petit Palais-musée des beaux-arts de la Ville de Paris
L’essentiel des dessins de Claude étant aujourd’hui conservé en Angleterre, le musée Condé détient – avec ses douze feuilles – le plus important ensemble de France après
le musée du Louvre. Cette collection est exposée pour la première fois avec les eaux-fortes de Claude dont le duc d’Aumale fit également l’acquisition.
« Vue du Tibre surplombant l’Acqua Acetosa, vers l’ouest » (1662) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Collection particulière
Les dessins de Claude saisissent la luminosité propre aux différentes heures du jour, le scintillement du feuillage des arbres, les masses dressées à contre-jour ou la dilution du paysage dans l’horizon. Si des lavis d’encre rapidement appliqués au pinceau ou des traits griffonnés à la plume sont les principaux instruments de sa pratique en plein air, il lui arrive aussi de reprendre ses feuilles en atelier pour leur conférer une note plus finie.
« L’Arabesque » (vers 1630) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Petit Palais – musée des beaux-arts de la Ville de Paris
Si sa carrière longue de plus de cinquante ans se déroule presque intégralement à Rome, il ne dessine qu’à de rares reprises la topographie urbaine de Rome et les deux feuilles du musée Condé sont à cet égard d’une importance capitale.
« La Tour ronde éclatée pour découvrir la statue du roi des Romains » (1637) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Petit Palais-musée des beaux-arts de la Ville de Paris
Après de premières expérimentations aussi maladroites qu’émouvantes à l’eau-forte, Claude se sert également de l’estampe pour immortaliser des festivités qui se déroulent dans la ville éternelle. Les feux d’artifice qu’il s’attelle à représenter le confrontent à un nouveau type de lumière, non naturelle cette fois.
« Barque de pêche accostée à un rivage » (vers 1640) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon
Si les scènes portuaires, les bateaux qui peuplent celles-ci et les tempêtes en mer comptent parmi les premiers sujets traités par Claude, l’élément aquatique demeure présent dans son œuvre jusqu’au bout. Il sert parfois à confronter l’être humain à un déchaînement des éléments dont la puissance le dépasse et le sidère.
« Port de mer au soleil couchant » (vers 1635-1640) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée Condé (Chantilly)
Claude utilise volontiers des papiers à fonds teintés pour faire émerger une atmosphère onirique de ses dessins et ne se sert pas des rehauts de gouache blanche que pour distribuer les ombres et les lumières, mais aussi pour représenter l’effet vaporeux d’une brume légère, de la rosée sur la végétation ou de nuages gorgés de pluie.
« Paysage avec un troupeau de vaches traversant un gué » (1670) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée Condé (Chantilly)
Les paysages de Claude sont toujours le lieu d’une action plus ou moins dramatique, plus ou moins discrète. Qu’il s’agisse d’animaux, d’humains ou de dieux, les protagonistes de ses œuvres évoluent dans un environnement qui reflète leurs préoccupations.
« Une Chèvre couchée » (vers 1635-1645) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée du Grand Siècle (Saint-Cloud), donation Pierre Rosenberg
En renouant perpétuellement avec ses propres compositions, Claude dialogue avec lui-même et explore toujours plus profondément le potentiel illimité que la nature offre à l’artiste paysagiste. Signe de cette quête exigeante, les études d’après nature qui composent son répertoire dessiné ne sont elles-mêmes jamais reprises à l’identique dans ses peintures, mais presque toujours transformées.
« Paysage avec le palais de Staphyle » (vers 1672) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie (Besançon)
À la mort de Claude, son fonds d’atelier est dispersé et de nombreux collectionneurs achètent les dessins que l’artiste gardait jusqu’alors pour lui. Les collectionneurs anglais développent un goût particulier pour lui et l’essentiel de son œuvre est aujourd’hui conservé outre-Manche. Durant ses années d’exil à Twickenham, dans la banlieue de Londres, le duc d’Aumale contracte à son tour cette passion.
« Liber Veritatis » par Richard Earlom (1743-1822) d’après Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600 – 1682) – Musée Condé (Chantilly)
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
« Bénédiction des chevaux à Rome devant Santa Maria Maggiore » (vers 1635-1640) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée Condé (Chantilly)
Commissariat de l’exposition
Baptiste Roelly, conservateur du patrimoine au musée Condé
« Corps de ferme avec des arbres » (vers 1630-1635) par Claude Gellée, dit le Lorrain (vers 1600- 1682) – Musée du Grand Siècle (Saint-Cloud), donation Pierre Rosenberg
Exposition « Le Sceptre & la Quenouille. Être femme entre Moyen Âge et Renaissance »
8 mars – 17 juin 2024 Musée des Beaux-Arts de Tours
Plus d’une centaine d’œuvres issues des plus grands musées sont rassemblées pour mettre en lumière la place, le rôle et l’image des femmes dans la société des 15ᵉ et 16ᵉ siècles. L’exposition s’appuie sur les avancées historiques des dernières décennies et offre une mise en perspective historique à un enjeu majeur de nos sociétés contemporaines.
Pour cette visite privée exceptionnelle, vous êtes accompagnés par Elsa Gomez, conservatrice du patrimoine et co-commissaire de l’exposition.
« Dans une époque où les questions d’inégalité de genres à des degrés divers se posent de manière accrue et cristallisent le débat public, il importe justement de réinscrire ces problèmes sociaux fondamentaux dans leur épaisseur historique, afin de les penser. Il convient de les replacer dans un contexte qui permette de mieux en appréhender le sens et d’en éclairer certains fondements. […] L’espace muséal nous offre de ces rares moments de suspension dans l’immédiateté du quotidien, qui permettent ce « pas de côté » nécessaire pour s’ouvrir au temps long de l’histoire et venir, ce faisant, questionner nos certitudes. » – Elsa Gomez – Extrait du catalogue de l’exposition
« Le Banquier et sa femme » (première moitié du XVIe siècle) d’après Marinus van Reymerswaele (vers 1490 – vers 1546) – Musée des Beaux-Arts de Valenciennes
Depuis l’institution du mariage chrétien comme sacrement aux 12e-13e siècles, l’Église a peu à peu structuré la société autour du noyau constitué par le couple et sa descendance. Le mariage, stratégie d’union entre deux familles, est un enjeu fondamental pour les femmes et définit leur place dans la société.
Le lien matrimonial, fondamentalement dissymétrique, institue la soumission de la femme à son époux : le rôle des femmes se définit donc dans un référentiel masculin.
À droite : « Portrait d’homme » et « Portrait de femme » (premier tiers du XVIe siècle) par un artiste anonyme – Palais des Beaux-Arts de LilleEffigie funéraire de François Il de La Rochefoucauld et d’Anne de Polignac (avant 1554) par un artiste anonyme – Musée du Louvre
L’exposition explore les rôles dévolus aux femmes dans la société et les activités qui en découlent et qui structurent leur quotidien. Elle aborde la maternité, le travail et les loisirs auxquels s’adonnent les femmes, enfin la dévotion à Dieu, mais aussi aux autres.
« La Tireuse de cartes » (fin du XVIe – début du XVIIe siècle) d’après Lucas de Leyde (vers 1489/1494 – 1533) – Musée français de la carte à jouer (Issy-les-Moulineaux), dépôt du musée d’Arts de NantesMiséricorde avec la représentation d’un mari cocu chassant l’amant de son épouse caché dans un four – Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge (Paris)« Claude de Guise et Antoinette de Bourbon » (vers 1567 ?) par Léonard Limosin (vers 1515 – 1575-1577) – Musée national de la Renaissance – château d’Écouen« Joueuse de douçaine » (vers 1560) par un artiste anonyme – Bibliothèque nationale de France (Paris)
Dans un contexte de réflexion et de débat sur la nature et la condition féminines, la fin du Moyen Âge voit s’opposer les partisans d’un discours misogyne et les fervents défenseurs de la cause féminine. Les théologiens, les traités d’enseignement ou la jurisprudence consacrent un panel de vertus considérées comme féminines auquel il est attendu que les femmes se conforment, et qui se retrouve dans l’iconographie : chasteté et continence, humilité, obéissance, douceur, dévotion.
« Scène inspirée de la comédie » dit « La Femme entre deux âges » par un Atelier parisien (vers 1580-1590) – Musée des Beaux-Arts de Rennes« La Carcasse » ou « Lo Stregozzo » (vers 1520 – 153) par Marcantonio Raimondi (vers 1480 – vers 1530) ou Agostino Veneziano (vers 1490 – 1540) d’après Girolamo Genga (vers 1476 – 1555) ? – Bibliothèque nationale de France (Paris)
Assez paradoxalement, les 15e et 16e siècles voient fleurir les représentations de femmes fortes maniant l’épée, symbole masculin par excellence. Les héroïnes bibliques ou mythologiques en armes, telles que Judith ou les Amazones, sont extrêmement populaires.
« Judith brandissant la tête d’Holopherne Flandres » (vers 1530-1533) d’après Ambrosius Benson (vers 1495 – 1550) – Musée de Grenoble
Par l’usage de nombreux symboles, les femmes qui gouvernent s’affirment comme les détentrices d’une puissance politique et lignagère qu’elles cherchent toujours davantage à légitimer. Cet art de la mise en scène constitue l’une des facettes du pouvoir au féminin entre le début du 15e et la fin du 16e siècle.
« Portrait de Catherine de Médicis France » (vers 1556) d’après François Clouet (avant 1520 – 1572) – Établissement public du château et du domaine national de Versailles
« Pas plus qu’aujourd’hui, « la femme » des XVe et XVIe siècles n’a d’existence réelle, et derrière ces visages abstraits, les réalités vivantes que l’on parvient à appréhender sont autrement plus complexes et variées, « faites d’arrangements, de renversements, de résistances » (Dominique Godineau). Elles fluctuent selon les situations personnelles, les caractères des protagonistes. Elles résultent de l’interaction de facteurs autres que le sexe et qu’il est fondamental de prendre en compte, tels que l’âge, la situation matrimoniale, le contexte rural ou urbain, le rang social. » – Elsa Gomez – Extrait du catalogue de l’exposition
Commissariat de l’exposition
Elsa Gomez, conservatrice du patrimoine au musée des Beaux- arts de Tours Aubrée David-Chapy, agrégée et docteure en histoire moderne
« La dame aux pensées » (fin du XVe siècle) par un artiste anonyme – Musée du Louvre
Cette exposition est réalisée en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France, la participation exceptionnelle du musée du Louvre et du musée national de la Renaissance – château d’Écouen.
Exposition « Le Sceptre & la Quenouille. Être femme entre Moyen Âge et Renaissance » – Musée des Beaux-Arts de Tours
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
Exposition « Le Sceptre & la Quenouille. Être femme entre Moyen Âge et Renaissance » – Musée des Beaux-Arts de Tours
Exposition « Le Sceptre & la Quenouille. Être femme entre Moyen Âge et Renaissance »
8 mars – 17 juin 2024 Musée des Beaux-Arts de Tours
18 Place François Sicard
37000 Tours
Lévrier tenant un écu aux armes de Marguerite de Foix, duchesse de Bretagne – Tombeau de François II de Bretagne et Marguerite de Foix Tours (vers 1502-1507) par Jean Perréal, Michel Colombe et Jérôme Pacherot – Cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul (Nantes)
[Web-série] Mobilier national
Épisode 1 : Rambouillet, résidence royale et présidentielle
Le Mobilier national a pour mission d’assurer la conservation et la restauration de collections uniques au monde, de perpétuer et de transmettre des savoir-faire exceptionnels. Haut lieu de patrimoine, l’institution est aussi un acteur majeur de la création contemporaine et de la promotion des arts décoratifs à la française
Le web-magazine Coupe-File Art et le Scribe s’associent pour cette nouvelle web-série consacrée au Mobilier national.
Pour ce premier épisode, Nicolas Bousser, historien de l’art et directeur du web-magazine Coupe-File Art, nous fait découvrir l’atmosphère unique du château de Rambouillet, résidence royale et présidentielle. À ses côtés, Gérald Rémy, inspecteur des collections du Mobilier national, et Christophe Batard, architecte des monuments historiques, présentent le cabinet de travail du président Auriol et les espaces privés aménagés pour Napoléon Ier.
Cabinet de travail du président de la République – Château de Rambouillet
Appartement de Napoléon, l’antichambre – Château de RambouilletAppartement de Napoléon, la chambre – Château de RambouilletAppartement de Napoléon, la salle de bain – Château de RambouilletBureau dans la chambre d’ami de l’appartement présidentiel – Mobilier de Suzanne Guiguichon – Château de Rambouillet
Les inspecteurs du Mobilier national sont chargés de la conservation des œuvres et veillent sur une collection d’environ 100.000 biens culturels comportant essentiellement des textiles (tapis, tapisseries, textiles d’ameublement), des bronzes et meubles de qualité (de Louis XIV au design contemporain).
Les huit inspecteurs suivent et inspectent également les 25.000 biens déposés (bureaux, fauteuils, chaises, tables, tapis, tapisseries, luminaires…) dans 450 institutions dépositaires. Tous les cinq ans, l’inspecteur procède sur place à une inspection en examinant un à un les biens déposés et en établissant un constat d’état.
Salon Médicis – Château de Rambouillet
« Ambassadeur du goût et de la qualité française, magnifique expression de l’âme et du génie français » – Vincent Auriol sur le livre d’or du paquebot Ile-de-France (1951)
Cabinet de travail du président de la République – Château de Rambouillet
Rambouillet 1950, dans l’intimité du Président Auriol
Grâce à un partenariat exceptionnel avec le Mobilier national, le château de Rambouillet présente jusqu’au 21 avril 20024, une exposition qui met à l’honneur le cabinet de travail du président Auriol réalisé par le décorateur Jacques Adnet. Des meubles exceptionnels de Jean-Charles Moreux, conçus initialement pour Rambouillet mais qui auront finalement pris le chemin de l’Élysée, sont également présentés.
Appartement des chefs d’État étrangers – Château de Rambouillet
Quatre chambres reconstituées et de l’appartement des chefs d’Etat étrangers (photo ci-dessus) sont ouverts pour la première fois au public. L’ameublement a été complété pour une expérience immersive au cœur de l’intimité du Président et de ses invités à Rambouillet.
Salon Médicis – Château de Rambouillet
Enfin, le fameux salon Médicis (photo ci-dessus), espace de convivialité aménagé par les décorateurs André Arbus et Raymond Subes peut être découvert dans l’antique salle des marbres du château.
Exposition « Rambouillet 1950, dans l’intimité du Président »
10 décembre 2023 – 21 avril 2024
Château de Rambouillet
Commissariat de l’exposition
Gérald Rémy, conservateur du patrimoine, inspecteur des collections, Mobilier national Isabelle de Gourcuff, administratrice du château de Rambouillet, Centre des monuments nationaux Camille Canteloup, référente des collections, Centre des monuments nationaux Anne-Claire Saunier, responsable du service culturel, assistée de Lise Leboeuf
Écrit au 11ème siècle par la poétesse Murasaki Shikibu, « Le Dit du Genji » est considéré comme l’œuvre la plus emblématique de la littérature classique japonaise. Évoquant les raffinements de la cour impériale de l’époque Heian (794-1185), il suscite une très riche iconographie : estampes, kimonos, sculptures, peintures, objets précieux et jusqu’aux mangas contemporains.
Plus récemment, le maître tisserand Itarô Yamaguchi (1901-2007) réalise quatre rouleaux d’après ceux peints de l’époque Heian, illustrant les scènes du « Dit du Genji ». Ces rouleaux exceptionnels sont montrés pour la première fois ensemble et déroulés dans leur intégralité pour l’exposition du musée Guimet.
Pour cette visite privée, suivez Aurélie Samuel, conservatrice du patrimoine et commissaire de l’exposition.
« Dit du Genji » – Première moitié du 19º siècle – Albums reliés en accordéon – Bibliothèque nationale de France (Paris)Bouddha Amida assis – Époque de Heian, première moitié du 11° siècle – Musée GuimetPortrait de Murasaki Shikibu – Page tirée de Cent poètes célèbres du Japon – Époque d’Edo, 19e siècle – Musée Guimet
« Quand on me demande quelle est la romancière que j’admire le plus, c’est le nom de Murasaki Shikibu qui me vient aussitôt à l’esprit, avec un respect et une révérence extraordinaire (…) c’est le Marcel Proust du Moyen Âge nippon. » – Marguerite Yourcenar dans « Les Yeux ouverts » (1980)
« La poétesse Ono no Komachi » – Époque de Momoyama, 16e siècle – Musée Guimet
L’époque de Heian (794- 1185) est celle de l’essor du bouddhisme au Japon. L’écriture évolue grâce à la réforme de l’éducation et à une simplification des kanjis. Ces idéogrammes, hérités de la Chine, restent l’apanage des lettrés japonais mais vont être transformés en hiragana, une écriture cursive adaptée à la langue japonaise appelée, à l’origine, « onnade » (main de femme). Grâce à cet accès plus aisé à l’écriture, la littérature féminine japonaise va prendre un essor considérable.
Série « Dit du Genji en cinquante-quatre chapitres Époque d’Edo » (1852) par Utagawa Hiroshige (1797-1858) – Fondation Jerzy Leskowicz (Paris)Détail de la série « Comparaisons du monde flottant aux chapitres nuageux du Genji » – « Le Clos au Paulownia » par Utagawa Kuniyoshi (1797-1861) – Époque d’Edo (1843-1847) – Musée Guimet
Dans le « Dit du Genji », Murasaki Shikibu s’inspire de la vie de la cour, des hommes et des femmes, dans leurs complexités et leurs évolutions, sociales et psychologiques. Cette œuvre devient le creuset d’une nouvelle identité japonaise et une source d’inspiration pour tous les artistes, d’hier et d’aujourd’hui.
Paravent à six volets « La tempête » (Nowaki) – Époque d’Edo, fin du 16e siècle – début du 17e siècle – Collection privée (Paris)
La multitude des scènes décrites dans le « Dit du Genji » explique l’engouement des artistes pour cette œuvre depuis le 12e siècle. Une attention particulière est portée aux contextes des événements, aux lieux mais aussi aux saisons, éléments primordiaux dans l’art pictural japonais.
Détail de la série »Dit du Genji en cinquante-quatre chapitres » par Utagawa Hiroshige (1797-1858) – Époque d’Edo (1852) – Collection Georges Leskowicz (Paris)
L’invention de la gravure sur bois au 17e siècle va offrir un nouveau support et permettre aux grands maîtres de l’estampe de renouveler l’imaginaire des scènes les plus célèbres du « Dit du Genji », parfois réinterprétées ou réadaptées à la mode contemporaine. La publication d’une version parodique du roman par Ryutei Tanehiko (1783-1842) fera évoluer l’iconographie de l’œuvre dans de nouvelles directions.
Maître Itarô Yamaguchi naît le 18 décembre 1901 dans une famille de tisseurs de soieries du quartier Nishijin à Kyoto. Il commence très jeune à tisser sur un métier à mécanique Jacquard pour de riches commanditaires.
Rideau-écran, ceintures de kimono, rouleaux suspendus et kimono de cérémonie par Itaro Yamaguchi (1901-2007) – SHIKO (Kyoto)
Après cinquante ans de carrière, à l’âge de 70 ans, Maître Itarô Yamaguchi décide de « laisser un chef-d’œuvre qui serait la concrétisation des plus hautes qualité et technicité atteintes dans l’utilisation du métier Jacquard« . Il décide de reproduire en tissage les rouleaux peints du « Dit du Genji » datant du début du 12e siècle, conservés au musée Tokugawa de Nagoya et au musée Goto de Tokyo.
Détail de l’un des rouleaux tissés du « Dit du Genji » par Itaro Yamaguchi (1901-2007) – Musée Guimet
Afin de remercier la France d’avoir inventé le métier Jacquard qui a sauvé l’industrie du tissage à Kyoto, Maître Yamaguchi offre son chef-d’œuvre au musée Guimet. Dans l’exposition, les quatre rouleaux sont présentés ensemble dans leur intégralité pour la première fois.
Rouleaux tissés du « Dit du Genji » par Itaro Yamaguchi (1901-2007) – Musée Guimet
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
Robe de cérémonie miniature (20e siècle) – Collection UNESCO (Paris)
Exposition « À la cour du Prince Genji » – Musée Guimet
Commissariat de l’exposition
Aurélie Samuel, conservatrice du patrimoine
Exposition « À la cour du Prince Genji » – Musée Guimet
Exposition « À la cour du Prince Genji. 1000 ans d’imaginaire japonais »
22 novembre 2023 – 25 mars 2024 Musée national des arts asiatiques – Guimet
6, place d’Iéna
75116 Paris
Loupe et écritoire de Maître Itaro Yamaguchi – SHIKO CO., LTD. (Kyoto)
Conçue à partir de la réflexion d’Alain Schnapp, auteur de l’importante « Une histoire universelle des ruines » (2020), l’exposition propose une transposition de sa pensée, avec plus de 300 œuvres présentées, des arts premiers à l’art contemporain. L’exposition propose un périple à travers les ruines, dans un dialogue continu entre les civilisations autour de quatre thèmes : la mémoire et l’oubli, la tension entre nature et culture, le lien entre le matériel et l’immatériel et la confrontation entre présent et futur. Son ambition est d’interroger les sociétés à travers l’histoire et en même temps de se confronter aux recherches des artistes contemporains.
Pour cette visite privée, vous êtes accompagnés par Sylvie Ramond, conservateur en chef du patrimoine, directeur général du pôle des musées d’art MBA | macLYON, et par Alain Schnapp, historien et archéologue, professeur émérite à l’Université de Paris-I.
« Les Découvreurs d’antiques » (vers 1765) par Hubert Robert (1733-1808) – Musée de Valence« Voici mon cœur ! » (2018-2022) par Khaled Dawwa – Mucem (Marseille)
« Tous les hommes ont un secret attrait pour les ruines. Ce sentiment tient à la fragilité de notre nature, à une conformité secrète entre ces monuments détruits et la rapidité de notre existence. » – François-René de Châteaubriand
« Veüe de Pierre-Levée, prez Poitiers, sur la hauteur du fauxbourg St Saturnin, qui est toute d’une pierre et que l’on vien voir par curiositez estant tenu comme une sépulture des antiens Pictes » (1699) par Louis Boudan (actif entre 1687 et 1709) – Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la photographie (Paris)« I Collected Personal Secrets » par Hreinn Friðfinnsson – Galerie Papillon (Paris)Estampage dit « Grande Inscription d’Angkor Vat » – Début du 20º siècle (estampage), 1702 (inscription) – École française d’Extrême-Orient, ParisTablette de lamentation sur les ruines de Lagash lors de la guerre opposant les royaumes de Lagash et d’Umma. Inscription cunéiforme – Tello (Girsu), Mésopotamie, règne d’Urukagina, vers 2340 avant J.-C. – Musée du Louvre
Il existe diverses manières de faire face à l’oubli. La première consiste à édifier des monuments gigantesques si résistants qu’ils pourront s’opposer au passage du temps, à l’image des mégalithes de la Préhistoire ou des pyramides d’Égypte. Les souverains égyptiens et orientaux de l’Antiquité ne se sont pas contentés de bâtir. Ils ont aussi écrit sur les murs de leurs pyramides, sur les tablettes déposées dans les fondations de leurs palais et de leurs temples, l’écriture contribuant à conforter leur légitimité et à assurer la continuité avec le passé.
Les textes inscrits par les Égyptiens sur les monuments, les stèles ou les cônes funéraires sont des messages lancés vers le futur qui visent à établir une continuité de génération en génération, de siècle en siècle.
« La Construction de la Tour de Babel (vers 1585) par Henrick III van Cleve (?) – Fondation Custodia (Paris)
Des motifs comme celui de la Tour de Babel, indéfiniment repris par les artistes à la suite de Pieter Brueghel l’Ancien et interprétée ici par Hendrick III van Cleve, peuvent nourrir des fictions imagées, comme dans les albums de bandes dessinées de Benoît Peeters et François Schuiten, qui appartiennent aussi bien au passé qu’au futur.
Planche originale (40) de « La Tour » (1987) par François Schuiten (né à Bruxelles en 1956) et Benoît Peeters (né à Paris en 1956) – Bibliothèque nationale de France – réserve des livres rares (Paris)
« Non seulement les œuvres de nos mains sont détruites ; (…) les œuvres de la nature elles-mêmes sont bouleversées et nous devons supporter avec une âme égale la destruction des villes. Elles ne sont debout que pour tomber, c’est la fin qui les attend toutes. » – Sénèque
« Destruction de Sodome et Gomorrhe » par Mathieu Dubus (vers 1590 – 1666) – Collection particulière
Après la destruction, la ruine accueille l’éclosion lente de nouvelles formes de vie. Plantes, arbustes, organismes divers et animaux envahissent des lieux qui leur étaient inaccessibles auparavant. Toits et murs effondrés ouvrent sur de nouvelles portions de ciel. L’œuvre du temps réconcilie le monument et le paysage en y réinstaurant la vie.
Le Relief avec scène bucolique, chef-d’œuvre de l’art de la Rome antique (photo ci-dessous), met en scène une vie rurale idyllique, en harmonie avec les ruines environnantes.
Relief avec scène bucolique – Empire romain, ler siècle après J.-C. – Staatliche Antikensammlungen und Glyptothek (Munich)
« Fiat mundi confusa ruina » – « le monde devient une ruine confuse » – Lucrèce
« Vue imaginaire de la Grande Galerie du Louvre en ruines » (1796) par Hubert Robert – Musée du Louvre
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
Exposition « Formes de la ruine » – Musée des Beaux-Arts de Lyon
Commissariat de l’exposition
Alain Schnapp, historien et archéologue, professeur émérite à l’Université de Paris-I Sylvie Ramond, directeur général du pôle des musées d’art, MBA | macLYON, directeur du musée des Beaux- Arts de Lyon, conservateur en chef du patrimoine
Assistés de Zoé Marty, conservatrice du patrimoine, musée d’art moderne et contemporain
de Saint-Étienne Métropole Chiara Vitali, assistante scientifique, ENS Ulm / École du Louvre
Avec la participation d’Amandine Delbart, conservatrice du patrimoine stagiaire
« Des voyageurs iront s’asseoir sur les ruines, aux bords de la Tamise » [The New Zealander] (1872) par Gustave Doré (1832-1883), dessinateur, et Adolphe-François Pannemaker (1822-1900), graveur – Bibliothèque nationale de France -département des Estampes et de la photographie (Paris)
En savoir +
Consultez la page spéciale consacrée à l’exposition sur le site Internet du musée des Beaux-Arts de Lyon.
À gauche : Scène érotique provenant d’Herculanum – Ier siècle (45-79 après J.-C.) – Museo Archeologico Nazionale di Napoli, Cabinet secret
Exposition « Formes de la ruine »
1er décembre 2023 – 3 mars 2024 Musée des Beaux-Arts de Lyon
20 place des Terreaux
69001 Lyon
Exposition « Formes de la ruine » – Musée des Beaux-Arts de Lyon
Exposition « Prosper Mérimée (1803 – 1870) »
15 décembre 2023 – 18 mars 2024
Musée national du château de Compiègne
L’exposition présente Prosper Mérimée à la fois le créateur d’un des plus grands mythes littéraires de tous les temps – celui de Carmen – mais aussi l’archéologue à l’origine de la protection des monuments historiques, l’académicien, le sénateur et l’homme du monde, proche du couple impérial.
Pour cette visite privée exceptionnelle, vous êtes accompagnés par Marc Desti, conservateur général du Patrimoine – Appartements historiques.
Buste rétrospectif de Prosper Mérimée (1872) par Jean-Paul Aubé (1837-1916) – Institut de France (Paris)Exposition « Prosper Mérimée (1803 – 1870) » au château de Compiègne« L’impératrice Eugénie » par Jean-Auguste Barré (1811-1896) – Musée national du Château de Compiègne, dépôt du Musée national du château de Versailles
À travers portraits et documents, l’évocation de ses amitiés – écrivains comme Stendhal ou Hugo, peintres comme Delacroix – introduit ensuite à une section consacrée à l’homme de lettres en nous mettant en présence de Colomba ou Carmen, dont Bizet devait faire l’un des opéras les plus célèbres du répertoire.
Exposition « Prosper Mérimée (1803 – 1870) » au château de Compiègne« Prosper Mérimée dans ses voyages archéologiques » (1857) par Ferdinand Bac (1859-1952) – Musée national du château de Compiègne« Vue de Champlieu et des antiques gallo-romains trouvés dans ses fouilles » par Octave Édouard Jean Jahyer (1826-?), graveur, Étienne Bocourt (1721-1913), dessinateur, d’après Edmond Caillette de l’Hervilliers (1825-1876) – Gravure parue dans « Le Monde illustré » du 25 décembre 1858 – Musée national du château de CompiègneÀ gauche : « Aphrodite accroupie » dite « Vénus de Vienne », réplique antique d’une statue en bronze du 2e siècle avant J.-C. marbre – Musée du Louvre
Fils de peintre et proche des artistes, Mérimée a construit une oeuvre littéraire où l’art – et la peinture en particulier – est une source d’inspiration importante. Il est moins connu qu’il fit deux recensions du Salon, en 1839 et 1853. Or la critique d’art de Mérimée apparaît aujourd’hui comme un chaînon oublié de l’histoire, alors qu’elle s’avère essentielle pour la compréhension des rapports complexes entre romantisme finissant, académisme et réalisme. L’exposition rassemble les principales oeuvres ayant retenu son attention.
« Madame Ducret de Villeneuve, née Sophie Duvaucel » (1827) par Thomas Lawrence (1769-1830) – Musée du Louvre, cabinet des Dessins
Commissariat de l’exposition
Commissaire général : Rodolphe Rapetti, conservateur général du Patrimoine. Directeur des musées et domaine nationaux des Châteaux de Compiègne et Blérancourt Laure Chabanne, conservatrice en chef du Patrimoine – Musée d’Orsay, Paris Jean-François Delmas, conservateur général du Patrimoine – Cabinet des arts graphiques et bibliothèques Marc Desti, conservateur général du patrimoine – Appartements historiques
« Idylle », dit aussi « L’Innocence » ou « Daphnis et Chloé » (1852) par Jean-Léon Gérôme (1824-1904) – Musée Massey (Tarbes)
Sources pour cet article :
– texte : dossier de presse de l’exposition
– photographies : @scribeaccroupi
Exposition « Prosper Mérimée (1803 – 1870) » au château de Compiègne