Portrait présumé de Jules César
50-40 avant J.-C.
Musée départemental Arles antique
Cette statue en marbre de Dokimeion (Phrygie, actuelle Turquie) serait un portrait de Jules César réalisé de son vivant. Elle a été découverte dans le lit du Rhône en 2007 par l’archéologue Luc Long.
C’est bien la physionomie de César, je l’ai reconnu tout de suite quand il a été au grand jour, mais c’est une image nouvelle, avec le vérisme de l’époque et avant les représentations conventionnelles d’un César divinisé. […] On retrouve le cou allongé, les plis qui marquent l’âge (il devait avoir une cinquantaine d’années) la pomme d’Adam saillante, le front haut et large, la calvitie bien marquée. » – Luc Long
L’apparence physique de Jules César (101-44 avant J.-C.) nous échappe presque complètement. Malgré les descriptions littéraires, aucune sculpture ne porte une inscription antique permettant une identification certaine.
Dès la fin du 19e siècle, l’archéologue suisse Johann Jacob Bernoulli dénombre une soixantaine de portraits sculptés appelés traditionnellement “César”. Il classe ces portraits en distinguant deux séries qui sont restées, jusqu’à ce jour, des références. Mais toutes ces sculptures ont été réalisées après la mort de César, principalement pour des raisons politiques ou de piété filiale de la part d’Octave : les traits sont donc idéalisés.
Il avait, dit-on, une haute stature, le teint blanc, les membres bien faits, le visage un peu trop plein, les yeux noirs et vifs, une santé robuste, si ce n’est que, dans les derniers temps de sa vie, il était sujet à des syncopes subites, et à des terreurs nocturnes qui troublaient son sommeil. […] – Suétone dans « Vie de Jules César »
Il attachait trop d’importance au soin de son corps; et, non content de se faire tondre et raser de près, il se faisait encore épiler, comme on le lui reprocha. Il supportait très péniblement le désagrément d’être chauve, qui l’exposa maintes fois aux railleries de ses ennemis. […] Aussi ramenait-il habituellement sur son front ses rares cheveux de derrière; et de tous les honneurs que lui décernèrent le peuple et le sénat, aucun ne lui fut plus agréable que le droit de porter toujours une couronne de laurier. » – Suétone dans « Vie de Jules César »
La statue découverte dans le lit du Rhône partage de nombreux traits avec d’autres portraits connus de César : coiffure, rides, joues creuses, fossette à la commissure des lèvres, plis dans le cou… Toutefois, l’expression empreinte de tristesse, la tête penchée, le nez busqué et la forme beaucoup plus ronde du visage la distingue des autres séries jusque-là connues.
Le portrait d’Arles pourrait donc représenter un colon romain de la première génération. Toutefois, le fait qu’il ait été sculpté dans une pièce de marbre importée de Phrygie (Turquie actuelle), très certainement par un sculpteur grec de talent, tend à désigner ici le fondateur de la colonie romaine en Arles (« Arelate »).
En 2007, à sa sortie de l’eau, l’identification fut spontanée. Il semblait, en effet, extrêmement vraisemblable que cette belle, puissante et expressive tête de marbre, au regard pénétrant et incomparable, fût l’effigie de Jules César. Depuis, cette intuition s’est confirmée. La découverte de ce portrait offre désormais de nouvelles perspectives et impose de reconsidérer le corpus des effigies de César qui va sans aucun doute se renouveler. » – Luc Long
Le buste de César est exposé au Musée départemental Arles antique
César ne vieillit pas. Il mûrit. Ses cheveux ne blanchissent pas, ils s’illuminent. César a tout réussi, tout conquis. […] César est de la race des seigneurs. D’ailleurs, le césar du meilleur empereur a été décerné à César. Avé Moi ! » – Propos d’Alain Delon jouant le rôle de Jules César dans « le film Asterix aux Jeux Olympiques »
Sources :
– dossier de presse de l’exposition « Arles, les fouilles du Rhône – Un fleuve pour mémoire » au musée du Louvre (9 mars – 25 juin 2012)
– article « Ave ! Un buste de césar repêché ! » du 15 mai 2008 sur le site RFI
Mon grand ami Ebih-Il, l’intendant
vers 2400 avant J.-C.
Antiquités orientales
Musée du Louvre
André Parrot (1901-1980) était un grand archéologue, directeur du département des antiquités orientales du Louvre, puis directeur du musée. En 1933, une découverte fortuite allait le conduire en Syrie, sur les bords de l’Euphrate, et lui permettre de découvrir l’emplacement de la cité antique de Mari.
Dans son rapport préliminaire sur la première campagne des fouilles de Mari à l’hiver 1933-1934, André Parrot raconte les circonstances de la découverte de cette « cité fabuleuse ».
Dans les premiers jours du mois d’août 1933, le lieutenant Cabane […] faisant une tournée d’inspection aux environs de sa résidence, Abou-Kémat, petite ville aux bords de l’Euphrate, toute proche de la frontière d’Iraq, rencontra sur un tell un groupe de Bédouins procédant à une inhumation et fort occupés à déterrer des pierres pour orner leur tombe. Quelques jours plus tard, un indigène se présentait au bureau du lieutenant Cabane, lui demandant « ce qu’il fallait faire de l’homme qu’ils avaient trouvé ». Comprenant immédiatement de quoi il s’agissait, l’officier se rendait au tell (Tell lîarïrï) et se trouvait en présence de la statue mutilée d’un personnage acéphale, mains jointes sur la poitrine, le bas du corps traité dans le style schématisé de la montagne. […] Les Musées Nationaux demandèrent la concession du site qui leur fut accordée par M. Seyrig, Directeur du Service des Antiquités. Dans les premiers jours de décembre 1933, la Mission avait rejoint Abou-Kémal où elle installait son cantonnement. »
« Les trouvailles faites au cours du dégagement du sanctuaire furent particulièrement abondantes. Il s’agit spécialement des ex-voto déposés sur les banquettes par les fidèles de Mari. Offrandes qui subirent des mutilations, contre-coup des guerres et des pillages. […] Dans ce seul temple nous avons ramassé : une petite statue, cinq statuettes complètes, vingt et une statuettes acéphales, treize têtes détachées, quatre têtes sur buste, vingt-huit corps de statuettes, vingt bases ou socles de statuettes. » – André Parrot
Arrivée au lieu-dit du tell Hariri en décembre 1933, l’équipe d’archéologues décida de porter ses efforts sur une des buttes de l’ouest de la colline. Le 22 janvier 1934, ils découvrent une tête de statue masculine aux yeux incrustés de lapis-lazuli et, le 23 janvier, le corps qui complétait la statue.
Celle-ci portait une inscription, incisée dans le dos :
Ebih-Il, nu-banda, a offert sa statue pour Ishtar Virile »
Mon ami Ebih-Il venait d’être découvert.
Dans les années 1930, la Syrie est sous mandat français. La loi de partage après fouilles dispose que les objets mis au jour soient répartis en deux lots de valeur équivalente, l’un pour le pays de découverte et l’autre pour celui du découvreur.
La statue d’Ebih-Il est envoyée à Paris et rejoint les collections nationales.
André Parrot décrit ainsi Ebih-Il :
Petite statue en albâtre blanc, d’un homme assis (hauteur : 0,52m), vêtu du jupon à étoffe floconneuse. […] Il a le crâne absolument rasé, mais il porte cependant une barbe qui s’attache à la hauteur des yeux et laissant largement dégagées les pommettes des joues et les lèvres supérieure et inférieure, se termine assez court, en mèches calamistrées et bouclées. »
Les sourcils réunis à la base et incrustés de bitume, accentuent l’attache très fine d’un nez aquilin. Les yeux sont particulièrement soignés pour rendre du mieux possible la vie du regard. Raffinement de l’artiste qui a combiné le schiste, la coquille et le lapis lazuli, indiquant respectivement cils et paupières, cornée et iris. Les lèvres très fines esquissent un demi-sourire. »
Le rendu du reste du corps témoigne aussi d’une technique soignée. Le buste, entièrement nu, est parfaitement modelé et aminci à la taille. Les deux mains étaient ramenées sur la poitrine, jointes (main gauche fermée placée dans la droite), mais malheureusement le bras et le coude gauches ont été cassés dans l’antiquité et la base du coude droit écornée. »
Ayant le torse nu, le personnage est vêtu seulement du jupon avec le nœud plaqué au bas du dos. Mais cette fois, au lieu de représenter l’ensemble dans le style habituel du kaunakès, l’artiste a su parfaitement indiquer dans la pierre le floconneux des longues mèches de laine légèrement ondulées. […] L’homme est assis sur un siège arrondi sans dossier, d’un type un peu spécial. Sans doute y verra-t-on un escabeau en bois, avec une enveloppe de joncs recourbés et tressés, le jonc seul ne nous paraissant pas donner une résistance assez grande. Les pieds manquent, mais il reste l’attache des chevilles qui sortent sous la robe. »
Nous daterions volontiers cette statue des environs de l’an 2950, car l’examen des signes de l’inscription obligea une date haute. » – André Parrot
Mon ami Ebih-Il est l’un des trésors du département des antiquités orientales du Louvre.
Source : rapport préliminaire sur la première campagne des fouilles de Mari à l’hiver 1933-1934, par André Parrot
Exposition « Le voyage illustré d’Emile Guimet en Asie »
6 décembre 2017 – 12 mars 2018
Musée national des arts asiatiques – Guimet
Fils d’un industriel lyonnais, Émile Guimet (1838-1918) est le fondateur du musée parisien qui porte son nom. En 1876, il entame un grand voyage avec le peintre et caricaturiste Félix Régamey (1844-1907) afin de parcourir le Japon, le Chine, l’Asie du Sud-Est, l’Inde et Ceylan.
L’exposition du musée Guimet évoque ce voyage extraordinaire et les découvertes faites par les deux hommes, partis pour recueillir des sculptures, peintures et ouvrages destinés à l’Œuvre de la vie d’Émile Guimet : dresser un tableau comparé des religions.
Buste d’Émile Guimet (1886) par François Girardet (1852-1932) – Collection privée
L’Égypte
Chez Émile Guimet, le goût d’ailleurs est moins une quête d’exotisme qu’un souci de comprendre l’autre et de le faire connaître. Il consigne donc ses souvenirs dans des carnets de voyage qu’il publie à son retour.
« Jeune arabe assis sur une sculpture égyptienne » (1865) par Louis Morel-Retz (1825-1899)
En 1865, j’entreprenais, comme tout le monde, un voyage de touriste en Égypte. La vue des monuments, les visites au Musée de Boulaq, la lecture du merveilleux catalogue rédigé par Mariette, attrayant même pour les profanes, attachant comme un roman, les petits objets antiques qu’on se croit obligé de rapporter, tout cela avait ouvert mon esprit aux choses des temps passés et particulièrement aux croyances encombrantes dont les symboles se déroulent en Égypte sur des kilomètres de murailles. » – Émile Guimet
Isis, bronze de l’Égypte ptolémaïque – Collection privée
Il faut […] admirer […] surtout le grand hypostyle, qui ressemble à une forêt de colonnes monstrueuses ; le plafond écroulé partout, et les nombreux oiseaux qui gazouillent dans le feuillage des chapiteaux complètent l’illusion. […] le silence, la majesté, la splendeur de ce lieu formaient un ensemble que je n’oublierai jamais. » – Emile Guimet dans « Croquis égyptiens, journal d’un touriste » (1867)
« La salle hypostyle de Karnak, Thèbes » (avant 1922) par François-Etienne Lahaye (1878-1949)
Alors que Ferdinand de Lesseps creuse le canal de Suez, Guimet découvre en Egypte sa vocation en visitant le musée de Boulaq, l’ancêtre du musée du Caire.
« Caire. Tombeau des Califes » (vers 1870-1880) par Félix Bonfils (1831-1885) – Collection privée« La citadelle du Caire » par Constantin et Georges Zangaki
Je sentais que ces objets que je réunissais restaient muets et que pourtant ils avaient des choses à me dire, mais que je ne savais pas les interroger. Je me mis à lire Champollion, Chabas, de Rougé […] Alors se dressa devant moi cette formidable histoire de l’Égypte […] Il fallait tourner mes regards vers l’Inde, la Chaldée, la Chine. » – Emile Guimet
Le Japon
Émile Guimet et Félix Régamey arrivent au Japon en août 1876.
J’aurai pour le Japon un passeport diplomatique et une mission du gouvernement me chargeant d’étudier les religions de l’Extrême-Orient. Vous voyez qu’un dessinateur m’est indispensable. Tâchez d’être mon compagnon, nous passerons ainsi dix mois qui éclaireront tout le reste de notre vie. » – Emile Guimet
« Deux prêtres de la secte Shingon à Kyoto expliquent à Émile Guimet les qualités de leur dogme » par Félix Régamey
Les déplacements de Guilet et Régamey sont limités à quelques villes et soumis à autorisation des autorités. Ils visitent des temples et des monastères, s’initient à l’art de manger avec des baguettes et de coucher sur une natte à même le sol.
« Emile Guimet avec le grand prêtre du temple de Nikko et l’interprète Kondo » par Félix Régamey
Recommandé par les autorités japonaises, le gouverneur de Kyoto organise pour Émile Guimet des rencontres avec les représentants du shinto et d’écoles bouddhiques. Il en profite pour acheter des ouvrages et objets religieux et rituels.
« Femme et deux enfants dans le train au Japon (ligne Yokohama-Tokyo) » (1876) par Félix Régamey
Félix Régamey dessine sans relâche, croque des personnages, des monuments, des paysages.
« Seishi Bosatsu » par Kosho (actif au début du 13e siècle)
La Chine
Arrivés à Shanghaï en novembre, Émile Guimet et Félix Régamey sont déçus par la Chine, qu’ils explorent peu. Le pays leur apparaît désespérément pauvre, sale et sombre et ils n’ont guère de temps pour essayer de dépasser cette vision négative. Émile Guimet se heurte à l’incompréhension des religieux qu’il essaie d’interroger sur leurs doctrines, Félix Régamey à l’hostilité de la foule lorsqu’il tente de dessiner dans la rue.
« Pont sacré et pont banal à Nikko » par Félix Régamey
Ceylan et l’Inde
Après une escale à Singapour en janvier 1877, les deux hommes visitent les principaux sites de l’île de Ceylan, où Émile Guimet continue d’interroger moines et bonzes.
« Bonzes de Colombo » par Félix Régamey
Le pays que nous traversons est très riche et a de grandes lignes. On y voit des figuiers énormes dont les racines aériennes plusieurs fois replantées forment des cloîtres de verdure. Les lianes gigantesques composent avec des bambous hauts comme des palmiers un tissu inextricable à travers lequel le tigre seul peut circuler. » – Emile Guimet
« Bayadères » par Félix Régamey
L’exposition universelle de 1878
De retour en France après dix mois de voyage, Félix Régamey s’active à transformer les dessins esquissés sur le vif en grandes toiles didactiques destinées aux futures salles du musée. De son côté, Emile Guilet rédige un rapport au ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts. Il fait part de sa volonté de doter la ville de Lyon d’un grand « musée religieux ».
Dans le cadre de l’Exposition universelle de 1878 à Paris, Émile Guimet présente les toiles de Régamey avec une sélection d’œuvres asiatiques, essentiellement japonaises.
Éléments de bois de char de procession avec Siva, Laksmi, Siva et Parvati
Le musée des religions
En septembre 1879, Jules Ferry inaugure, à Lyon, le musée d’Émile Guimet encore en construction. Sa vaste rotonde inscrite à l’angle de deux rues est visible de loin.
« Visnu couché sur le serpent Ananta » (17e-18e siècle)
Mais le projet peine à soulever l’intérêt de la ville. Ainsi, dès 1882, des échanges avec l’État et la Ville de Paris le conduisent à transférer son musée dans la capitale.
Ce musée a pour objet de propager la connaissance des civilisations de l’Orient et de l’antiquité classique, de faciliter les études religieuses, artistiques et historiques au moyen des images, des objets du culte et des œuvres d’art qui composent ses collections, mais l’Histoire des Religions, but primitif de sa fondation reste son objectif principal. » – Emile Guimet
Buste d’Antinoüs en Osiris », marbre du 19e siècle – Musée du Louvre
Richesse des collections
Dans la rotonde d’entrée du musée, le visiteur était accueilli par le buste d’Antinoüs en Osiris.
Au rez-de-chaussée se déployaient ses collections de céramique japonaise et chinoise, tandis que les étages étaient consacrés à la statuaire religieuse des pays d’Asie.
Réplique du mandala sculpté du Toji Yamamoto Yosuke, Japon (ère Meiji)
Le mandala du Toji
En octobre 1876, lors d’une visite au temple Toji de Kyoto, Émile Guimet est frappé par un ensemble de statues dont l’organisation, sous forme d’un mandala (un « ensemble complet » rigoureusement orienté), offre à ses yeux une explication claire de la doctrine de la secte bouddhique japonaise Shingon.
Guimet en commande une copie.
Réplique du mandala sculpté du Toji Yamamoto Yosuke, Japon (ère Meiji)
Au centre apparaît le Bouddha Vairocana (Dainichi Nyorai), entouré de quatre autres bouddhas figurant ses vertus fondamentales et les étapes de l’Éveil, eux-mêmes assistés de bodhisattva.
Une façon spectaculaire de conclure la visite !
Exposition « Le voyage illustré d’Emile Guimet en Asie »
Musée national des arts asiatiques – Guimet
6 Place d’Iéna
75116 Paris
Suivez l’actualité du musée Guimet sur Twitter : @MuseeGuimet
Exposition « Etre pierre »
29 septembre 2017 – 11 février 2018
Musée Zadkine (Paris)
A l’occasion du cinquantième anniversaire de la disparition d’Ossip Zadkine (1888-1967), le musée Zadkine propose une forme de réflexion sur la part vivante et dynamique de la pierre, matériau de prédilection des artistes. L’exposition présente près de 130 pièces, parmi lesquelles des objets archéologiques, et s’appuie sur la collection de sculptures en pierre du musée.
Au cours du Paléolithique supérieur (entre 40.000 et 10.000 ans avant J.-C.), se développe la civilisation dite des « grottes ornées » qui a vu naître la représentation figurée des signes.
Propulseur sculpté figurant un cheval bondissant (vers 15.000 avant J.-C.), prêt du musée d’Archéologie nationale (Saint-Germain-en-Laye)Feuille de laurier (vers 20.000 avant J.-C.) et bifaces (vers 100.000 avant J.-C. et vers 500.000-300.000 avant J.-C.), prêts du musée d’Archéologie nationale (Saint-Germain-en-Laye)
Un ensemble d’objets votifs et de mobilier funéraire, provenant de cultures paléolithiques et néolithiques, ainsi que des objets intercesseurs d’Océanie et d’Afrique sont présentés en vis-à-vis d’œuvres modernes.
Pierre funéraire (fin 19e-début 20e siècle), prêt du musée du quai Branly (Paris)« Joueuse de luth » – Ossip Zadkine« Singe » (1918) – Ossip Zadkine
On fait du marbre avec de la chair, et de la chair avec du marbre. » – Denis Diderot
« Maternité » – Ossip Zadkine
Lorsqu’on tire sur un seul fil de la nature, on découvre qu’il est attaché au reste du monde. » – Jessica Castex
Figurine féminine (2.700-2.300 avant J.-C.), prêt du musée du Louvre (Paris)« Jeux de nymphes » (1900-1910) – Auguste Rodin, prêt du musée Rodin (Paris)
Mon corps est fait de la même chair que le monde » – Maurice Merleau-Ponty
« Tête » (1945) – Pablo Picasso, collection particulière
Les pierres représentent cette absence de péripéties où je vois la rançon de la vie. » – Roger Caillois
« Femme assise » (1914) – Henri Gaudier-Brzeska, prêt du Centre Pompidou (Paris)
Pierre, cerveau de la terre. Les circonvolutions de vos formes sont adoucies par la force continue de la rivière. Vous renfermez la pensée, la logique de la sphère à laquelle votre forme se rapproche. […] Votre force est pensive, une pensée grave, calme, sereine. » – Giuseppe Penone
« Tête héroïque » (1909-1910) – Ossip Zadkine
Je me souviens de ce vieux caillou, ce gros morceau de granit rose, charrié par les glaces et abandonné par elles dans un champ de mon oncle par un glacier arctique ; avant de pouvoir y tracer une seule ligne, j’ai honteusement cassé tous mes ciseaux rapportés de Londres. Je demandais au forgeron de me fabriquer les quelques ciseaux qui me permirent de tailler dans le granit une sorte de tête. » – Ossip Zadkine
« Tête de femme » (1924) – Ossip Zadkine« Tête aux yeux de plomb » (1919) – Ossip Zadkine« Tête d’homme » (1924) – Ossip Zadkine
Inauguré en 1982, le musée Zadkine est dédié à la mémoire et à l’œuvre du sculpteur d’origine russe qui vécut et travailla dans la maison et les ateliers qui l’abritent, de 1928 à 1967.
Exposition « Etre pierre »
Musée Zadkine
100bis Rue d’Assas
75006 Paris
Aujourd’hui, j’ai bravé le froid, vêtu de mon simple pagne, pour capturer ces images et vous les proposer.
Le spectacle des flocons de neige blanchissant le jardin des Tuileries et la cour Napoléon du Louvre me fascine toujours autant. Je vous en fais donc profiter.
C’est le temps de la ville. – Oh ! lorsque l’an dernier,
J’y revins, que je vis ce bon Louvre et son dôme,
Paris et sa fumée, et tout ce beau royaume
(J’entends encore au vent les postillons crier) » – Alfred de Musset
Jardin des tuileries depuis l’arc de triomphe du Carrousel
C’est l’hiver. Le charbon de terre
Flambe en ma chambre solitaire.
La neige tombe sur les toits.
Blanche ! Oh, ses beaux seins blancs et froids ! » – Charles Cros
Dans l’interminable
Ennui de la plaine
La neige incertaine
Luit comme du sable. » – Paul Verlaine
La bise se rue à travers
Les buissons tout noirs et tout verts,
Glaçant la neige éparpillée
Dans la campagne ensoleillée. » – Paul Verlaine
L’arbre au banc – Jardin des Tuileries
Plus de chansons dans l’air, sous nos pieds plus de chaumes.
L’hiver s’est abattu sur toute floraison ;
Des arbres dépouillés dressent à l’horizon
Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes. » – Guy de Maupassant
Cliquez sur l’image ci-dessous pour voir tomber la neige ! C’est cadeau 😉
De sa conception à son ouverture au public, en passant par son aménagement et sa scénographie, le documentaire diffusé sur France 5 fait découvrir les coulisses du Louvre Abu Dhabi.
Cliquer sur ici pour voir le documentaire en replay (disponible jusqu’au 10 février 2018).
Suivez l’actualité du Louvre Abu Dhabi sur Twitter :
Athlète victorieux faisant une libation
Vers 470 avant J.-C.
Antiquités grecques
Musée du Louvre
Cette statuette grecque date du début du Ve siècle avant J.-C. Il s’agit d’une statuette en bronze dédiée à Apollon par l’un des vainqueurs aux concours pythiques. Elle provient très probablement du sanctuaire de Delphes.
Le jeune homme est représenté nu. Sa chevelure est entourée d’un bandeau sur lequel est fixé un ornement en forme de feuille ou de plume, appelé « apex ». Il était porté par les athlètes en signe de victoire.
Le bras droit tendu vers l’avant, l’éphèbe devait tenir une phiale aujourd’hui perdue.
La phiale est une sorte de vase sans pied ni anse, d’origine perse, que l’on tient par le bord et par dessous. Si l’œnochoé est notamment utilisé pour remplir la coupe des convives lors des banquets , la phiale est un ustensile réservé à l’usage rituel.
Le jeune athlète effectue une offrande liquide (libation) pour remercier le dieu de sa victoire.
A cette justesse harmonique, à cette tenue logique et balancée du mouvement, il est permis d’appliquer le mot rythme. » – Th. Homolle
L’athlète victorieux (5e siècle avant J.-C.) et le visiteur pressé (21e siècle) – Musée du Louvre
Exposition « Venenum, un monde empoisonné »
15 avril 2017 – 13 avril 2018
Musée des Confluences (Lyon)
Les poisons sont présents dans la nature et ont, de tout temps, suscité à la fois de la crainte et une forme de fascination. Ce sont de puissants instruments pour conserver ou conquérir le pouvoir, éliminer discrètement ses ennemis… ou mettre fin à ses jours.
C’est dans la première partie de l’exposition du musée des Confluences que je vous propose de nous arrêter afin de (re-)découvrir l’histoire de grands personnages dont les noms sont associés à des empoisonnements, volontaires ou accidentels.
Venenum
Le mot latin « venenum » peut se traduire par « poison », mais il revêt plusieurs significations : venin, breuvage magique, substance dangereuse ou médicamenteuse.
Grec d’Asie Mineure né vers 40 après J.-C., le médecin Dioscoride est l’un des premiers à parler de poisons et d’antidotes dans son ouvrage « De materia medica ». Il faudra ensuite attendre la Renaissance pour que la distinction entre les propriétés toxiques et thérapeutiques d’une même substance soit théorisée par un médecin suisse.
Horus et Isis
Dans l’Égypte antique, Horus est sauvé par les pouvoirs de sa mère, la déesse Isis, d’une piqûre de scorpion. Il devient le dieu capable de protéger les humains des animaux venimeux.
Je suis Isis, la déesse, la maîtresse de la vertu magique, magicienne dont les formules sont puissantes. Tout reptile qui mord m’obéit. Descends en bas, poison de Mestet ! […] N’aie pas de force ! Arrête ! Retourne ! Enfuis-toi en arrière, poison, ne monte pas en haut ! » – Stèle de Metternich (vers 350 avant J.-C.)
Stèle guérisseuse « Horus sur les crocodiles » (664-332 avant J.-C.) – Musée d’art et d’archéologie de Guéret
Hercule
Dans la mythologie grecque, Hercule est l’une des victimes d’un contact malheureux avec un poison…
Alors que le centaure Nessos attaque Déjanire, l’épouse d’Hercule, pour la violer, ce dernier le blesse avec une flèche empoisonnée par le sang de l’Hydre de Lerne. En mourant, Nessos conseille perfidement à Déjanire de conserver son sang comme philtre d’amour. Plus tard, pensant qu’Hercule lui est infidèle, Déjanire lui offre une tunique qu’elle a trempée dans ce sang. A peine l’a-t-il revêtue qu’il ressent la brûlure du poison. La douleur est si intense que le héros préfère y mettre fin en se jetant dans les flammes d’un bûcher.
« La mort d’Hercule sur le mont Œta » par Antoine Laurent Dantan – École des Beaux-Arts de Paris
Son sang frémit et bouillonne comme l’onde froide où l’on plonge un fer ardent. Un poison brûlant le consume. Toujours agissants, des feux avides dévorent ses entrailles. De tous ses membres coule une sueur livide. On entend pétiller ses nerfs ; la moelle de ses os se fond et s’évapore. » – « Métamorphoses » d’Ovide
Thésée et Egée
Thésée, fils du roi d’Athènes Egée et héritier légitime du royaume, est victime d’une tentative d’empoisonnement. Médée, compagne de son père, réussit à convaincre son époux d’empoisonner le jeune homme à l’occasion d’un banquet. Fort heureusement, Egée reconnaît la marque de la famille sur la garde en ivoire de l’épée de Thésée et fait échouer la machination. La coupe contenant le poison est finalement renversée.
Plaque Campana : « Thésée et Egée » (période romaine) – Musée du Louvre
Médée compose un mélange où elle fait entrer l’aconit qu’elle avait jadis apporté des bords de la Scythie. Ce poison a pris naissance, dit-on, entre les dents du chien d’Échidna. » – « Métamorphoses » d’Ovide
Cornes d’animaux
Au Moyen Âge, les plus riches et puissants font goûter leurs plats de peur d’être empoisonnés (rappelons que la restauration rapide et le hamburger frites n’existent pas ;-). Ils utilisent aussi de nombreux ustensiles censés détecter les poisons, fabriqués à partir de cornes de certains animaux. Le pouvoir de l’objet ci-dessous est renforcé par l’inscription « Dieu bénit celui qui boit ».
Corne à boire (XVe siècle) – Musées d’Angers
Socrate
Socrate (469-399) pratique le questionnement pour faire venir au jour ce que ses interlocuteurs portent en eux (“Connais-toi toi même”). Il est accusé de « corrompre la jeunesse et [de] ne pas croire aux dieux qu’honore la cité mais de croire en d’autres choses, des affaires de démons d’un nouveau genre ». Au cours de son procès, il déclare que c’est « la calomnie et l’envie du grand nombre, qui ont déjà fait condamner beaucoup d’autres hommes de bien et qui, je pense, en feront condamner encore ; il n’y a pas à craindre que cela s’arrête à moi. » Il est emprisonné et condamné à boire une boisson à base de ciguë, une plante très toxique.
Il portait la coupe à ses lèvres, et il la vida jusqu’à la dernière goutte avec une aisance et un calme parfaits. Jusque-là nous avions eu presque tous assez de force pour retenir nos larmes ; mais en le voyant boire, et quand il eut bu, nous n’en fûmes plus les maîtres. Moi-même, j’eus beau me contraindre ; mes larmes s’échappèrent à flots ; alors je me voilais la tête et je pleurais sur moi-même ; car ce n’était pas son malheur, mais le mien que je déplorais, en songeant de quel ami j’étais privé. […] Celui qui lui avait donné le poison, le tâtant de la main, examinait de temps à autre ses pieds et ses jambes ; ensuite, lui ayant fortement pincé le pied, il lui demanda s’il sentait quelque chose. Socrate répondit que non. Il lui pinça ensuite le bas des jambes et, portant les mains plus haut, il nous faisait voir ainsi que le corps se glaçait et se raidissait. Et le touchant encore, il déclara que, quand le froid aurait gagné le cœur, Socrate s’en irait. ». – « Phédon » de Platon
« La mort de Socrate » (1762) par Jean-Baptiste Alizard
Thémistocle
Thémistocle est un homme politique athénien (524-vers 459 avant J.-C.). Durant les guerres médiques, il commande la flotte grecque lors de la bataille de Salamine et conduit la Grèce à la victoire. Selon Plutarque, il se donne la mort en s’empoisonnant pour ne pas avoir à combattre les Grecs comme le lui demande le roi des Perses.
Mais ce qui l’en éloignait le plus, c’était la honte qu’il y aurait à flétrir la gloire de ses premiers exploits, et de renverser lui-même ses trophées. Il prit donc la résolution magnanime d’éviter ce déshonneur par une mort digne de sa vie. » – « Vie de Thémistocle » par Plutarque
« Thémistocle buvant le poison » par Henri-Camille Danger
Néron
Britannicus est le fils de l’empereur Claude, né d’un premier mariage. Néron orchestre la mort de Britannicus grâce à un poison préparé par Locuste, une Gauloise connue pour ses talents d’empoisonneuse. Cet évènement est décrit par Suétone : lors d’une première tentative d’empoisonnement, Britannicus n’est affecté que d’une simple diarrhée. Néron convoque Locuste pour qu’elle revoie sa préparation. Le poison, servi à Britannicus lors d’un repas, tue immédiatement le jeune homme.
Il força [Locuste] à préparer, dans sa chambre et en sa présence, le poison le plus rapide et le plus efficace. Ensuite, on l’expérimenta sur un chevreau qui ne mourut qu’au bout de cinq heures. On le fit cuire et recuire, et on le donna à un porcelet qui périt sur le champ. » – « Néron » de Suétone
Cléopâtre
Après la mort de Jules César, dont Cléopâtre était l’amante, les triumvirs qui dirigent Rome, Marc Antoine, Octave et Lépide, se partagent l’empire romain. L’Orient échoit à Marc Antoine, qui, séduit par Cléopâtre, lui abandonne ses territoires. À l’issue de la bataille d’Actium qui oppose les troupes d’Octave à celles de Cléopâtre, cette dernière, ne supportant pas son humiliante défaite, ne trouve d’autre échappatoire que la mort.
« La mort de Cléopâtre » (1845) par Gustave Lassalle-Bordes – Musée Rolin (Autun)
La reine se serait suicidée en dissimulant dans une corbeille de figues un serpent venimeux. Mais les circonstances de cette mort demeurent encore aujourd’hui mystérieuses. Pour Plutarque, qui fait état de plusieurs versions, Cléopâtre se serait donné la mort en ingérant du poison caché dans le creux d’une épingle à cheveux. Strabon évoque une pommade toxique qu’elle se serait appliquée.
Les Borgia
Le poison connait une période faste à la Renaissance. Les Borgia utilisent toutes sortes de poisons à base de mercure, d’arsenic, de phosphore, de pavot, de ciguë, etc… César Borgia porte une bague à poison qui lui permet d’empoisonner son ennemi en lui serrant simplement la main. La mort du pape Alexandre VI reste mystérieuse. Il aurait pu succomber à un empoisonnement, en consommant par mégarde un vin empoisonné, préparé pour un autre que lui…
« Portrait de César » par un peintre anonyme du XIXe siècle – Musée de la Chartreuse de Douai
« Vénus empoisonnant les flèches de l’Amour » de Nicolas Bertin – Musée des Beaux-Arts d’Arras« Ulysse et Philoctète » par Eugène Roger – Musée des Beaux-Arts de Chambéry
L’Angélus est un tableau que j’ai fait en pensant comment, ma grand-mère ne manquait pas, en entendant sonner la cloche, de nous faire arrêter notre besogne pour dire l’Angélus pour ces pauvres morts, bien pieusement et le chapeau à la main. » – Jean-François Millet (1865)
Millet USA
Avec « La Joconde », « L’Angélus » de Jean-François Millet est sans doute l’un des tableaux les plus célèbres et les plus copiés et détournés. Pourtant, Millet est un peintre mal connu et parfois rejeté. En dehors du musée d’Orsay et du musée Thomas-Henry à Cherbourg, l’essentiel de son œuvre est conservé aux Etats-Unis et au Japon.
« Bergère assise » (vers 1852) – J-F Millet – Institute of Art de Minneapolis« Le Bain de la gardeuse d’oies » – J-F Millet – The Walters Art Museum (Baltimore)« La Leçon de tricot » – J-F Millet – The Sterling and Francine Clark Art Institute (Williamstown)
Une grande rétrospective à Lille
Le Palais des Beaux-Arts de Lille propose la première grande rétrospective depuis l’exposition du Grand Palais (Paris) en 1975.
Nourrie de ses lectures et de références aux grands peintres, la peinture de Millet se teinte d’une poésie et d’une émotion qui dépasse la seule représentation du monde paysan.
« Le bouquet de marguerites » – Jean-François Millet – Musée d’Orsay
Jean-François Millet, le normand
Né en 1814 dans le Cotentin (Normandie), Jean-François Millet est l’aîné d’une famille nombreuse. L’aisance financière de ses parents paysans lui permet d’étudier et de se forger une véritable culture.
« L’homme à la houe » (vers 1860-1862) – J-F Millet – pierre noire et rehauts de blanc sur papier – Getty Museum (Los Angeles)
Tout cela sentait l’étable, le lait et le fumier, le foin et la sueur, dégageait cette saveur aigre, affreuse, humaine et bestiale, particulière aux gens des champs. » – Maupassant, « La Ficelle » (1883)
« L’homme à la houe » – J-F Millet – Getty Musem (Los Angeles)
Le scandale retentit lors de la présentation de « L’homme à la houe » au Salon. Certains sont effrayés par le personnage qu’ils comparent à un meurtrier venant de commettre un crime ou à « un monstre sans crâne, à l’œil éteint, au rictus idiot » (Paul de Saint Victor), les autres y voit un ralliement de Millet au socialisme.
Je me refuse à montrer ce travail gai et folâtre auquel certaines gens voudraient nous faire croire » – J-F Millet
« Les Bêcheurs » – J-F Millet – Bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (Paris)
Ses paysans sont peints avec la glèbe (motte de terre) qui leur colle aux sabots » – Vincent Van Gogh à propos des paysans de Millet
« Des paysans rapportent à leur habitation un veau né dans les champs » – J-F Millet – The Art Institute (Chicago)
Que voit-on dans ce champ de pierres ? Un paysan souffle, épuisé ; le hâle a brûlé ses paupières ; Il se dresse, le dos brisé ; Il a le regard de la bête qui, dételée enfin, s’arrête et flaire, en allongeant la tête, son vieux bât qu’elle a tant usé. » – Sully Prudhomme, « Paysan » (1865)
« Un Vanneur » (1848) – J-F Millet – The National Gallery (Londres)
Le Vanneur, qui soulève son van de son genou déguenillé et fait monter dans l’air, au milieu d’une colonne de poussière dorée, le grain de sa corbeille, se cambre de la manière la plus magistrale. II est d’une couleur superbe ; le mouchoir rouge de sa tète, les pièces bleues de son vêtement délabré sont d’un caprice et d’un ragoût exquis. L’effet poudreux du grain, qui s’éparpille en volant, ne saurait être mieux rendu, et l’on éternue à regarder ce tableau. Le défaut de M. Millet le sert ici comme une qualité. » – Théophile Gautier
Famille chrétienne
Issu d’une famille chrétienne, ses croyances l’amèneront à lire la Bible en latin sans pour autant être un fervent pratiquant.
La toile « Agar et Ismaël » est l’une des rares du peintre à s’appuyer sur un texte de la Genèse : dans le désert, un monde sans Dieu, Millet représente le désespoir d’Agar tandis que le corps famélique d’Ismaël est étendu à l’arrière-plan. On pense ici aux rescapés du « Radeau de la Méduse » peints par Géricault.
« Agar et Ismaël » (1848-1849) – J-F Millet – The Mesdag Collection (La Haye)
Pauline
Dessinateur talentueux, Millet étudie la peinture à Cherbourg , puis aux Beaux-Arts de Paris. Il échoue au concours pour le prix de Rome et perd sa bourse. Il retourne alors à Cherbourg pour gagner sa vie en tant que portraitiste. Il épouse Pauline Ono, la fille d’une famille de riches tailleurs. Elle meurt trois ans plus tard de la tuberculose.
« Pauline Ono en robe bleue » (vers 1841-1842) – Jean-François Millet – Musée Thomas-Henry (Cherbourg)
Dans l’ultime portrait de Pauline (ci-dessous), Millet souligne de sa palette la pâleur mortelle des traits de son épouse.
« Pauline Ono en déshabillé » (1843-1844) – J-F Millet – Musée Thomas-Henry (Cherbourg)
La femme paysanne
Je voudrais que dans la Femme faisant déjeuner ses enfants, on imagine une nichée d’oiseaux à qui leur mère donne la becquée. L’homme travaille pour nourrir ces êtres là » – J.F. Millet.
« La becquée » (vers 1860) – J-F Millet – Palais des Beaux-Arts de Lille
Le titre de réaliste m’a été imposé comme on a imposé aux hommes de 1830 le titre de romantiques » – J-F Millet
« L’été, les glaneuses » (1853) – Jean-François Millet – Kofu, Yamanashi Prefectural Museum of Art
Et d’abord les femmes, toutes celles qu’il nous montre (…) bien qu’abaissées aux travaux les plus humbles, bien que trempant des mains, des pieds, de l’être entier parmi les rusticités et les animalités de la vie, côte à côte avec les bêtes, dans les moiteurs des étables et des fumiers, dans les chaleurs des vêtements, toutes ces ployées et ces souffrantes sont au-dessus de la chair. Le travail qu’elles ahanent les dresse rigides, quoique serviles. Leurs attitudes, leurs gestes, leur tranquille, probe et sanctifié visage ! » – Emile Verhaeren
« Femme faisant paître sa vache » (1859) -J-F Millet – Musée du Monastère royal de Brou (Bourg-en-Bresse)« La fileuse, chevrière auvergnate » (1868-1869) – J-F Millet – Musée d’Orsay
Nouvelle compagne
Avec sa nouvelle compagne, une jeune fille de 17 ans avec laquelle il aura 9 enfants, Millet part s’installer au Havre, puis à Paris où il cherche à se faire connaître en se mêlant au milieu artistique.
« La Bouillie de l’enfant » – J-F Millet – Musée Fabre (Montpellier)« Le Chuchotement », dit « La Paysanne et l’Enfant » – J-F Millet – The National Gallery (Londres)
C’est le côté humain, franchement humain, qui me touche le plus en art » – J-F Millet
« Une nymphe entraînée par les amours » dit « L’Amour Vainqueur » (1847-1848) – J-F Millet – Musée Thomas-Henry (Cherbourg)
Barbizon
En 1849, Millet s’installe définitivement à Barbizon, en forêt de Fontainebleau, où il développe son atelier. Pendant cinquante ans (1825-1875), le petit village de Barbizon va être le laboratoire d’une colonie de peintres paysagistes désirant travailler «d’après nature» et fixer l’instant d’un paysage sur la toile.
Malgré les critiques de ses contemporains, Millet ne cherche en rien à suivre les mouvements artistiques du moment et développe son propre style.
« Le Printemps » – J-F Millet – Musée d’Orsay
La nature ne pose pas » – J-F Millet
« Les Meules : Automne » – J-F Millet – The Metropolitan Museum of Art (New-York)
Dans les dernières années de sa vie, Jean-François Millet se détourne de la vie paysanne. Les personnages disparaissent presque totalement de ses compositions. Millet recherche le calme et la solitude.
« La Nuit étoilée » – J-F Millet – Yale University Art Gallery (New Haven)
Le paysage est « une scène sur laquelle se joue le drame de l’humanité. » – Jean-François Millet
Œuvre ultime
« Les Dénicheurs de nids » est la dernière toile peinte par Millet. Elle illustre l’un de ses souvenirs d’enfance lorsque les pigeons sauvages étaient tués par centaines, aveuglés par des torches, la nuit, alors qu’ils se reposaient, perchés dans les arbres.
« Les Dénicheurs de nids » – J-F Millet – Museum of Art (Philadelphie)
Jean-François Millet meurt en janvier 1875 à l’âge de 61 ans dans sa maison de Barbizon.
Millet est un peintre profondément spiritualiste, à une époque qui ne l’est plus, ou qui ne l’est que mièvrement ou sentimentalement, quand elle l’est. […] Le réalisme est la réalité matérielle dans tout ce qu’elle a de brusque et de grossier, mais la réalité humaine doit être spirituelle pour être complète… et elle l’est chez Millet, qui met de la pensée sur les fronts hâlés de ses paysans, qui ne sont jamais les brutes de Courbet. » – Jules Barbey d’Aurevilly
La peinture de M. Millet a tout ce qu’il faut pour faire horripiler les bourgeois à menton glabre, comme disait Petrus Borel, le lycanthrope ; il truelle sur de la toile à torchons, sans huile ni essence, des maçonneries de couleurs qu’aucun vernis ne pourrait désaltérer. Il est impossible de voir quelque chose de plus rugueux, de plus farouche, de plus hérissé, de plus inculte ; eh bien, ce mortier, ce gâchis, épais à retenir la brosse, est d’une localité excellente, d’un ton fin et chaud quand on recule à trois pas. » – Théophile Gautier
« Terrassiers occupés aux éboulements de Montmartre » dit « Les Carriers » – J-F Millet – Museum of Art (Toledo)« Femme nue couchée » – J-F Millet – Musée d’Orsay
Sources :
– Dossier pédagogique de l’exposition
– Dossier de presse
Exposition Jean-François Millet
Palais des Beaux-Arts de Lille
18 Bis Rue de Valmy
59000 Lille
« Les Glaneuses (Agency job) » – Banksy (2009) – Collection particulière, Michael Citrone Bristol City Museum
Exposition « Musiques ! Échos de l’Antiquité »
Louvre-Lens
13 septembre 2017 – 15 janvier 2018
En Orient, en Égypte, en Grèce ou dans l’empire romain, la musique accompagne l’existence de la vie à la mort. Elle divertit les plus humbles comme les souverains. Elle permet d’obtenir leurs bonnes grâces des dieux et d’apaiser leur colère.
Si l’exposition du Louvre-Lens dévoile l’univers musical des civilisations qui s’étendaient des rives de la Méditerranée à celles de la mer Noire et du golfe persique, c’est au cœur de l’Égypte antique que je vous propose de plonger en « Musiques ! »
Modèle ou élément de meuble : emblème d’Hathor (664-332 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Hathor, déesse de la musique
Chapiteau hathorique (332-30 avant J.-C.) provenant de Dendara – Musée du Louvre
Dans l’Égypte antique, Hathor est la déesse de la musique. Elle est représentée sous les traits d’une jeune femme avec des cornes qui enserrent le disque solaire et des oreilles de vache.
S’il a aussi une fonction régénératrice et protectrice, le collier-menit que la déesse porte autour du cou sert également d’instrument à percussion.
Sur le bas-relief représenté ci-dessous, le roi offre de la bière et du lait à la déesse Hathor et au dieu Rê auxquels il adresse une prière pour obtenir leur protection dans le monde des morts.
Stèle du roi Antef II (2108-2059 avant J.-C.) – Metropolitan Museum of Art de New York
Au commencement étaient les percussions
Les claquoirs sont sans doute les premiers instruments à percussion apparus en Égypte dès la Préhistoire.
Le claquoir ci-dessous a été réalisé dans de l’ivoire d’hippopotame. L’instrument est en forme de bras dont la main est surmontée d’une tête de la déesse Hathor.
Claquoir en ivoire d’hippopotame (vers 2033-1069 avant J.- C.) – Musée du LouvrePaire de claquoirs en forme de mains, bois d’olivier (664-332 avant J.-C.) – Musée du LouvreClaquoir au nom d’une chanteuse d’Amon, bois de dalbergia (1550-1069 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Le sistre
Le sistre apparaît en Égypte dès l’Ancien Empire, soit vers 2700-2200 avant J.-C., à la même époque que le tambourin. Il compte parmi les instruments les plus nombreux découverts par les archéologues.
Les traverses dont est paré l’instrument sont garnies de disques de métal qui produisent le son en s’entrechoquant.
Hathor jouant du sistre découvert à Licht – (1843-1798 avant J.-C.) – Musée du LouvreSistre au nom du roi Amasis en faïence silicieuse (570 – 526 avant J.-C.) – Musée du LouvreStatuette de femme tenant un sistre (664 – 332 avant J.-C.) – Musée du Louvre
La harpe
La harpe est importée en Égypte durant le Nouvel Empire (2700-2200 avant J.-C.).
Le harpiste représenté ci-dessous est assis sur sa jambe gauche. Il cale la harpe contre son genou droit et son épaule et s’incline vers les cordes que pincent ses doigts.
L’homme semble âgé et déformé par une longue pratique de la harpe, comme l’indiquent sa poitrine creuse et son dos voûté.
Ostracon sur lequel est figuré un harpiste (664-610 avant J.-C.) – Metropolitan Museum of Art de New YorkHarpe d’Imenmès en bois d’acacias et cuir (1550-1069 avant J.-C.) – Musée du LouvreTête sculptée sur une harpe arquée (18ème dynastie) – Metropolitan Museum of Art de New YorkAssis sur un tabouret, Haroudja joue de la harpe devant Amon, Mout et Khonsou (4ème-1er siècle avant J.-C.)
La lyre
Les Égyptiens ont emprunté la lyre aux Mésopotamiens en l’adaptant.
Les cordes sont frappées à l’aide d’un plectre, une baguette de bois, en forme d’amande.
Bès jouant de la lyre (664-332 avant J.-C.) – Metropolitan Museum of Art de New York
Le luth
Le luth, formé d’une caisse en bois ou en carapace de tortue et d’un long manche droit, serait l’ancêtre lointain des guitares actuelles via le monde arabo- andalou.
Les cuillers d’offrande ci-dessous, ornées d’une joueuse de luth, témoignent de la popularité du thème le long des rives du Nil.
Cuiller d’offrande ornée d’une joueuse de luth (18e dynastie, vers 1550-1295 avant J.-C.) – Musée du LouvreCuiller d’offrande ornée d’une joueuse de luth (18e dynastie, vers 1550-1295 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Pacifier le dieu
Dans les temples égyptiens, la musique a pour finalité à la fois de pacifier le dieu et de le réjouir à l’image de l’artiste sur cette stèle, jouant de la harpe devant le dieu Rê-Horakhty.
Agenouillé devant son dieu, il dit « adorer Rê quand il brille ».
Stèle au chanteur Djedkhonsouiouefânkh jouant de la harpe devant le dieu Rê-Horakhty (1069-664 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Le dieu Bès est supposé repousser les forces maléfiques qui causent les maladies. Il est musicien mais il a d’autres talents artistiques comme le révèle la lampe ci-dessous.
Le trio est composé de trois instrumentistes, l’un soufflant dans une syrinx, le suivant dans un aulos et le dernier faisant sonner sa cithare à l’aide d’un plectre.
Lampe avec Bès et musiciens (époque ptolémaïque, vers 332-30 avant J.C.) – Musée du Louvre
Des cérémonies en musique
Le fragment de papyrus ci-dessous représente une cérémonie de fondation en musique.
En haut, le culte est rendu à plusieurs divinités parmi lesquelles le dieu-crocodile Sobek et la déesse Neith. Au milieu, le « prêtre lecteur-magicien » tient haut devant ses yeux un papyrus ouvert. Derrière lui s’avancent un joueur de tambourin et joueur de tambour qui rythment le rituel en cours de lecture.
Cérémonie de fondation en musique (1069-664 avant J.-C.) – Musée du LouvrePaire d’oreilles votives en faïence siliceuse (1550-1069 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Des musiques pour pleurer
Les pleureuses portent la main à la tête en signe de profond chagrin.
Statuette d’Isis en pleureuse (332-30 avant J.-C.) – Musée du Louvre
Cependant, une fois le mort enterré, sa chapelle funéraire est ornée de scènes de réjouissances. Banqueteurs, musiciens et danseurs ornent ainsi les parois des tombeaux.
Triompher en musique
La victoire est célébrée par de joyeux défilés comme en témoigne la scène de liesse ci-dessous. Des jeunes femmes en robe de lin transparent dansent. Un homme, qui joue de la trompette, les suit.
Talatate : scène de liesse (1353-1337 avant J.- C.) – Metropolitan Museum of Art de New York
Musique et fécondité
Cette scène de danse en musique est peinte sur une peau de chèvre. Le fait qu’un homme nu danse devant une jeune harpiste agenouillée conduit à penser que cette œuvre était destinée au temple d’Hathor.
Scène de danse en musique (1550-1458 avant J.-C.) – Metropolitan Museum of Art de New YorkFigurine érotique d’un harpiste – Égypte (époque ptolémaïque ou romaine) – Musée du Louvre
Je vous souhaite une année pleine de surprises et de découvertes.
Bonne année 2018 !
« De cette mer profonde émergeaient trois cents minarets, comme les mâts de quelque flotte immense submergée. Bien loin au Nord on apercevait les bois de dattiers qui plongent leurs racines dans les murs écroulés de Memphis. À l’Ouest, noyées dans la poussière d’or et de feu su soleil couchant, se dressaient les Pyramides. Le spectacle était grandiose. Il me saisissait, il m’absorbait avec une violence presque douloureuse (…) J’avais sous mes yeux Gizeh, Abousir, Saqqarah, Myt-Rahyneh (Memphis). Ce rêve de toute ma vie prenait corps. Il y avait là, presque à portée de main, un monde de tombeaux, de stèles, d’inscriptions, de statues. Le lendemain, je louais des mules et des ânes, j’achetais une tente et des provisions, tous les “impedimenta” d’un voyage dans le désert, et le 20 octobre (1850) dans la journée, je campais au pied de la grande Pyramide. » – Auguste Mariette, égyptologue
Exposition « Rubens – Portraits princiers »
4 octobre 2017 – 14 janvier 2018
Musée du Luxembourg (Paris)
Le musée du Luxembourg propose la première exposition consacrée exclusivement aux portraits princiers du peintre flamand Pierre Paul Rubens.
Suivez Cécile Maisonneuve, historienne de l’art, dans les salles du musée et découvrez les portraits de Philippe IV, Louis XIII et Marie de Médicis.
Rubens fait vraiment sur moi une forte impression. Je trouve ses dessins colossalement bons, je parle des dessins de têtes et de mains. Par exemple, je suis tout à fait séduit par sa façon de dessiner un visage à coups de pinceau, avec des traits d’un rouge pur, ou dans les mains, de modeler les doigts, par des traits analogues, avec son pinceau. » – Vincent Van Gogh
Anne d’Autriche, reine de France, par RubensMarie de Médicis, par RubensLouis XIII, par RubensL’archiduc Ferdinand, par RubensL’infante Isabelle Claire EugénieAutoportrait de Rubens
Musée du Luxembourg
19 rue de Vaugirard
75006 Paris
Suivez l’actualité du Musée du Luxembourg sur Twitter : @museeluxembourg
Découvrez l’exposition « Visiteurs de Versailles »
Bertrand Rondot, conservateur en chef du patrimoine au château de Versailles, nous invite à une découverte exceptionnelle de l’exposition « Visiteurs de Versailles ».
Une web-série exceptionnelle en 6 épisodes
Cliquez sur chaque image pour accéder à chacune des vidéos.
Exposition « Visiteurs de Versailles 1682-1789 »
22 octobre 2017 – 25 février 2018
Château de Versailles
Avec plus de 7 millions de visiteurs par an, le château de Versailles figure parmi les sites historiques les plus fréquentés au monde. Dans la nouvelle exposition temporaire, vous en saurez plus sur les visiteurs qui sont venus entre 1682 et 1789, qu’ils soient princes, ambassadeurs ou simples anonymes.