Exposition « Luca Giordano (1634-1705). Le triomphe de la peinture napolitaine »
14 novembre 2019 – 23 février 2020
Petit Palais – Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Avec près de 90 œuvres, l’exposition du Petit Palais présente, pour la première fois en France, une rétrospective consacrée au peintre Luca Giordano (1634-1705), bénéfiçiant de prêts des principales églises de la ville de Naples, du musée de Capodimonte et de nombreuses institutions européennes dont le musée du Prado. Au cours de sa carrière, Giordano exécute près de 5.000 tableaux et fresques… d’où son surnom de « Luca fa presto » (Luca qui va vite) !
Luca Giordano, la fièvre du pastiche
Né en 1634 à Naples, à l’époque la plus grande ville de l’Europe méridionale, Giordano fascine par sa virtuosité. Il reçoit d’importantes commandes de sa ville natale, de Venise ou encore de Florence. Il s’empare du style des grands maîtres – Caravage, Ribera, Rubens, Titien, Tintoret – pour le décliner à sa manière.
Parfois accusé d’être un faussaire, le peintre aimait s’amuser et démontrer sa virtuosité – mais aussi se moquer des connaisseurs – tout en rendant hommage aux grands peintres qu’il admirait.
La définition d’un mythe
Autour de 1653, le jeune Giordano se rend à Rome, s’immerge dans la grande tradition de Raphaël et se laisse séduire par les courants néovénitiens élaborés par Nicolas Poussin et Pierre de Cortone. Il y retrouve également l’art de Rubens.
Pour Giordano, le grand format reste trop petit : il s’imagine peindre à fresque, au-delà du cadre limité des toiles d’autel, ce qu’il pourra réaliser une vingtaine d’années plus tard.
L’héritage de Ribera
À Naples, les ordres monastiques favorisèrent un type de religiosité qui mettait l’accent sur les privations et les souffrances de la vie et encouragèrent la représentation des aspects les plus douloureux de la condition humaine. Cette sensibilité propre à Naples assura le succès de Jusepe de Ribera, Espagnol de naissance mais Napolitain d’adoption.
Saint Sébastien
Trois tableaux de saint Sébastien sont présentés dans l’exposition. La version de Ribera – une des dernières œuvres du peintre – révèle un éloignement du naturalisme caravagesque : les contrastes d’ombre et de lumière sont moins tranchés et le ton se fait plus intime.
Mattia Preti représente un Saint Sébastien ligoté, dans une composition à caractère vénitien.
Giordano réalise une œuvre encore marquée par l’influence de Ribera, mais qui montre déjà une ouverture aux nouveautés apportées par Preti.
Philosophes
Dans le climat de rigueur morale instauré par la Contre-Réforme et son projet de renouveau spirituel, les philosophes sont représentés en accentuant leur côté humain. Giordano peint ces hommes de culture comme des personnes ordinaires : un musicien, un astronome, un homme avec des lunettes ou un autre tenant un rouleau de papier…
Le Triomphe de la mort et la peste de 1656
La peste de 1656 bouleversa profondément la ville de Naples. Pendant six mois, l’épidémie fit rage et emporta plus de la moitié de la population. La peste s’imposa rapidement comme une source d’inspiration pour les artistes ayant échappé au fléau.
Luca Giordano réalisa des oeuvres votives visant à remercier les saints qui ont intercédé pour la cessation de la peste. La légende raconte que San Gennaro – saint Janvier –, protecteur de Naples, avait déjà sauvé la ville lors de l’éruption du Vésuve de 1631, empêchant la lave et les cendres d’atteindre ses faubourgs. Intercédant auprès de la Vierge vingt-cinq ans après pour éradiquer la peste, c’est encore une fois à ce saint que l’on doit le salut de Naples, qui devient ainsi l’un des plus vénérés.
Cabinet des dessins
Les études graphiques jouent un rôle de premier plan chez Giordano. Il prenait note de tout ce qui l’intéressait, quels que fussent l’époque ou le courant artistique, et il en tira un répertoire de motifs dans lequel puiser.
Au-delà des œuvres préparatoires à ses tableaux et fresques, Giordano réalisa également des compositions plus achevées qui ne sont liés à aucun tableau connu.
Le baroque local
Giordano, qui, pendant son voyage à Rome, a découvert les ciels sans limites des voûtes réalisées par Pierre de Cortone ainsi que le grand théâtre baroque du Bernin, n’hésite pas à introduire ces éléments dans son vocabulaire.
L’action orchestrée par Giordano est maintenant devenue une pièce de théâtre où les protagonistes s’adressent directement à l’observateur pour le transporter dans l’imaginaire voulu par le peintre.
Les métamorphoses du Baroque, le spectateur comme voyeur
À Florence, Giordano peint les fresques célébrant la dynastie des Médicis avec une iconographie païenne s’inscrivant dans la tendance, de plus en plus répandue en Italie, à brosser de vastes décors à sujets mythologiques dans les palais aristocratiques.
Puisant dans la tradition grecque et romaine, Giordano imagine des héroïnes sans voile, allongées et séduisantes, qui renvoient clairement aux nus voluptueux de Titien. À l’instar d’un satyre qui espionne Vénus, le spectateur devient voyeur, complice ultime de la mise en scène créée par l’artiste.
Giordano à la cour d’Espagne
Vers 1665, Giordano entreprit, à la demande de Philippe IV, une importante série de tableaux de grand format pour décorer une salle du monastère de l’Escurial. Il se rend en Espagne en 1692 pour y réaliser les fresques de l’escalier, des voûtes et du chœur de la basilique de l’Escurial.
Giordano devient peintre du roi Charles II. Abandonnant parfois le pinceau pour appliquer les couleurs avec ses doigts, il émerveille le souverain et en reçoit les honneurs.
Les créations ultimes
Même pendant son séjour en Espagne, Giordano exécuta et envoya à Naples des toiles. À son retour définitif en 1702, il s’engagea encore dans un cycle de six toiles pour l’église des Girolamini, le dernier de sa vie, exécuté avec l’aide de Nicola Malinconico, l’un des élèves de son atelier.
C’est Giordano que certains artistes du XVIIIe siècle, tels Hubert Robert ou Jean-Honoré Fragonard, choisiront de copier lors de leurs séjours napolitains : son héritage était voué à marquer durablement la postérité.
Source : dossier de presse de l’exposition
Toutes les photographies par @scribeaccroupi.
En savoir +
Sur le site Internet du Petit Palais.
Merci pour votre blog très intéressant qui nous permet de voir ou revoir les belles expositions de Paris et d’ailleurs.
Bravo pour ce beau travail!
Je vous remercie pour votre commentaire, très agréable à lire. 🙂